Guernesey, 22 mars 1860, jeudi matin, 7 h.
Bonjour, mon cher bien-aimé, bonjour à distance, de crainte de la contagion d’un rhume assez malfaisant qui m’a déjà presque envahie tout entière ; mais que cela ne t’inquiète pas pour moi car je sais à présent la manière de m’en servir et je te promets de le mener à bonne fin sans aucune collaboration du médecin. En attendant j’ai passé une très bonne nuit et je me sens déjà une faim [illis.] ce matin. Je souhaite que tu sois dans les mêmes bonnes conditions que moi à l’exception de mon rhume qui peut passer à la rigueur comme le superflu de la santé. A propos, Marquand a-t-il arrangé on affaire avec Miss Allix hier au soir ? Ces pauvres Marquand ont toujours maille à partir avec quelqu’un ou quelqu’une dans les ventes publiques. La dernière fois c’était à la vente Lefort [1] en concurrence avec Kessler et Duverdier ; un autre jour c’était avec Charles, une autre fois encore contre toi-même et ton horloge en laque ; enfin ces braves gens ont envie de tout et ne concluent rien, et ils s’en prennent à ceux plus alertes et [plusieurs mots illisibles] qu’eux, ce n’est pas précisément juste. Mais ils sont d’ailleurs d’assez bonnes gens pour qu’on leur passe ce petit travers asticot [2]. Quant à moi j’échappe, à mon grand regret, à ces conflits de pots cassés et de meubles boiteux puisque je ne vais jamais à ces encans, ne pas lire CANCANS, amusants dit-on, mais si par impossible je me faisais [adjuger ?] un bric-à-brac intéressant, Marquand et sa femme y [perdraient ?] leur guernesiais plutôt que de [plusieurs mots illisibles] leur céder. Telle est [plusieurs mots illisibles.] Mais je suis stupide de m’amuser à [plusieurs lignes illisibles.]
Juliette
BnF, Mss, NAF 16381, f. 58
Transcription de Claire Villanueva