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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 24 décembre [18]64, samedi matin, 8 h. ½

Bonjour, mon cher petit homme, bonjour à vous que j’aime et à toi que j’adore. Il fait beau sur la terre et sur l’onde, et votre oriflamme resplendit à votre balcon, ce qui me fait espérer que vous avez passé une very good nuit. De mon côté j’ai l’honneur de vous en offrir une non moins bonne avec tout le reste à l’avenant. Cela vous va-t-il ? Eh bien topez-là, je suis votre Juju à [boc  ?] et à [bac  ?], à cœur et à âme, à pot et à rôt, à pied et à cheval, à tu et à toi. En ce moment passe sous mes yeux un petit bateau à vapeur qui lutte avec le vent et qui va dans ta direction ; peut-être le regardes-tu en même temps ; dans cette pensée je te charge de toutes sortes de tendresses pour toi avec mission de les déposer dans ton cœur chemin faisant.
Ma pauvre Elisabet est toujours mal en point. Je crains que cela ne devienne plus sérieux, ce qui serait bien malheureux pour cette pauvre petite et jetterait d’une grande tristesse et un grand trouble dans mon petit intérieur. Car nous l’aimons, moi et Suzanne, et son honnêteté me donnait une sécurité que j’aurais bien de la peine à retrouver dans le personnel domestique de l’île si j’étais obligée par la force des choses de renoncer à elle. Il y a juste un an qu’elle a eu cette première atteinte si grave du mal de poitrine. Je tremble que ce ne soit une seconde attaque du même mal et j’en suis bien tourmentée pour elle et pour moi. Je tâche de la soigner de mon mieux en lui montrant beaucoup de tranquillité et de sérénité sur son mal dont elle ne s’inquiète pas du tout, du reste, ce qui est une grâce d’état. Et puis j’espère que je m’exagèrea son mal qui n’est probablement qu’une indisposition tout simple et qu’un peu de soin dissipera.
En attendant je t’aime, ce qui est ma manière de prier Dieu. Je me confie à lui et à toi et je vous adore et je vous bénis l’un par l’autre de toutes les forces de mon âme.

J.

BnF, Mss, NAF 16385, f. 274
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Florence Naugrette

a) « je m’exagères ».

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