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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 23 juillet 1860, lundi matin, 7 h. ¼

Bonjour, mon pauvre cher adoré, bonjour. Comment va ton bobo [1] ? As-tu passé une bonne nuit ? Je crains que tu n’ais pas bien dormi et que ce vilain temps n’influe sur cette petite rougeur indolente et insignifiante en apparence. Si j’en jugeais d’après celles que j’ai euesa souvent dans la même région cela ne serait rien. J’espère malgré notre triste expérience que cela ne sera rien non plus pour toi, cette fois-ci. En attendant il ne faut pas trop t’en préoccuperb tout en te soignant et surtout éviter les refroidissements. Peut-être aurait-il mieux valu ne pas ouvrir ta fenêtre si tôt ce matin. Il est vrai, mon pauvre adoré, que tu n’as que le choix des bâtons et que pour éviter un mal tu tomberais dans un pire, celui de la tête. Fais-donc pour le mieux, mon bien-aimé, pour conserver ta santé qui est à la fois ma vie propre et mon bonheur béni. Du reste il est impossible de rien comprendre à cette saison. Depuis hier il fait un froid noir et agressif et la petite pluie qui tombe en ce moment ressemble à de la neige fondue tant elle est pénétrante et malsaine. Pour moi j’en ressens toute la fâcheuse influence aussi. Je n’ai pas dormi de la nuit mais j’espère que le va-et-vient auquel je vais me livrer tout à l’heure fera une bonne diversion à mes innombrables maux. Quant à toi, mon adoré, tu auras la visite de tes Parisiennes [2], ce qui n’est peut-être pas un mal dans le moment où tu travaillesc trop. Dieu sait ce qu’il fait et puisqu’il t’envoie cette distraction inattendued c’est que tu en as besoin. Donc tu ferais bien d’être très aimable (ce qui ne te sera pas difficile) avec ces deux dames mais que cela ne t’empêche pas de m’aimer et de te soigner, ce qui est la même chose pour mon bonheur.

BnF, Mss, NAF 16381, f. 193
Transcription d’Amandine Chambard assistée de Florence Naugrette

a) « eu ».
b) « préocuper ».
c) « travaille ».
d) « inatendue ».

Notes

[1Hugo a un bouton dans le bas du dos, et craint le retour de l’anthrax qui avait failli l’emporter à l’été 1858.

[2Les Parisiennes sont Mme Lucas et sa fille Mme Alphonsine. Elles logent chez Mme Ménage. (CFL, t. XII, p. 1337.)

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