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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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21 octobre [1843], samedi matin neuf heures

Bonjour mon cher petit bien-aimé, bonjour, bonjour, vous êtes mon Toto chéri. Votre petit arrangement fait très bien, c’est charmant comme cela. Seulement, l’armoire ne fait pas bien du tout elle. Il faudra que j’avise à lui donner une autre place. En attendant c’est charmant, même avec le défaut de l’armoire.
C’est aujourd’hui que j’ouvre ma cheminée. Il fait décidément trop froid pour rester sans feu.
Jour Toto, jour mon cher petit o, je vous aime. Mon coup sur le nez fait très bien ce matin. J’ai l’air d’avoir reçu une volée de vous, ça me fait HONNEUR. J’ai l’espoir de conserver cette blessure honorable très longtemps à cause du froid. Cela fait partiea de la décoration intérieure de mon logis : - porte de papier et nez de carton.
J’attends les Lanvin aujourd’hui. J’espère qu’ils viendront un peu plus tôt que d’habitude et que tout sera fini avant la nuit. J’attendraib avant de faire venir le menuisier que Lanvin me dise s’il peut arranger le cadre. Je n’ai pas pensé à te demander de quelle couleur tu voulais tes cordonnets, la quantité et la grosseur dont tu les veux. Il faudra me dire tout cela pour que je ne fasse pas faire la commission de travers.
Comment va ta tête ce matin, mon Toto chéri ? Voilà un temps bien fait pour t’en donner un si tu ne l’avais plus. Quel froid noir et triste. Je ne peux pas me réchauffer même dans mon lit. Toi, qui es enrhumé déjà, mon Toto, il faut prendre garde à toi. Il est inutile que ton rhume de cerveau devienne un rhume de poitrine. N’aies pas froid mon pauvre amour, surtout à tes chers petits pieds. Pense à moi, désire-moi et aime-moi. J’en fais autant et plus de mon côté.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16352, f. 229-230
Transcription d’Olivia Paploray assistée de Florence Naugrette

a) « parti ».
b) « attendrait ».


21 octobre [1843], samedi soir, 6 h. ¼

Je continue mes horreurs, mon Toto. Je comprends, maintenant que je le vois par moi-même, comment on peut avoir les ouvriers pendant un mois chez soi sans faire faire de grands changements dans la maison. Aujourd’hui Lanvin a essayé de dorer la serrure. Je ne trouve pas qu’il ait très bien réussi mais il est vrai que je ne m’y connais pas. Nous avons aussi touché au meuble en laque mais je crains que cela ne te convienne pas. Enfin Lanvin a verni tes deux portraits.

22 octobre [1843], dimanche matin neuf heures

Bonjour mon Toto, bonjour mon Toto chéri. Tu vois, par le commencement de ce gribouillis, que j’étais en train de te donner l’emploi de ma journée et de te rendre compte de tous nos chefs-d’œuvrea à moi et à Lanvin. Tout a assez bien réussi à part la serrure. Je crois que Lanvin la recommencera dès qu’il aura fini de coller le papier. De ton côté, tu vas faire faire des essais par tes chers petits et je suis sûre d’avance qu’ils réussiront mieux, Toto surtout.
Voilà un temps bien dangereux pour les rhumes. Je te supplieb mon cher petit bien-aimé de prendre soin de toi. Il ne faut plus veiller sans feu mon Toto. C’est vouloir jouer sa santé à plaisir. En somme il ne s’agit que de quelques morceaux de bois. Tes servantes avant de s’aller coucher peuvent faire ton feu de manière à ce que tu n’aies qu’à le ranimer en rentrant. En ayant soin de mettre un garde-feu autour, il n’y a aucun danger. Pense d’ailleurs que le froid de la nuit peut te redonner tes douleurs de rhumatisme. Il faudrait avoir une bonne chancelière [1] bien fourrée en peau d’agneau. Le paletot en soie ouatéec qui est à la maison, je t’en ferai faire un autre pour ici. Un pardessus quelconque et ta peau de chamois sur tes cuisses et sur tes jambes, ceci est très essentiel mon cher amour adoré pour conserver ta santé qui est ma vie.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16352, f. 231-232
Transcription d’Olivia Paploray assistée de Florence Naugrette

a) « chefs-d’œuvres ».
b) « suplie ».
c) « ouatté ».

Notes

[1Chancelière. : sac fourré pour tenir les pieds au chaud.

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