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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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15 mars 1853

Jersey, 15 mars 1853, [mardi]a après-midi 3 h.

Ceci est mon premier gribouillis d’aujourd’hui, mon cher petit homme, et qui n’en vaudra guère mieux pour être venu tard car la migraine me travaille la cervelle d’une rude façon. C’est au point que je suis presque contente que tu ne sois pas venu me chercher pour sortir tant je souffre et tant je redoute touteb espèce de mouvement ou de bruit. Aussi, mon cher petit bien-aimé, fais tes affaires à ton aise et sans le moindre remordsc car il me serait tout à fait impossible de profiter de la promenade dans le cas où tu pourrais me faire sortir. Je te le dis sans la moindre amertume, mon pauvre doux adoré, et seulement pour t’ôter tout scrupule. D’ailleurs j’ai vu passer Mezaize et un autre monsieur il y a une heure ; ils se dirigeaient de ton côté. Il est donc très probable que cette visite te retiendra chez toi jusqu’à tantôt. Tu vois où j’en suis réduite, mon pauvre petit Toto, à refuser une occasion de sortie quand même elle m’arriverait à temps. Il faut être diantrement envahie par la migraine pour se résigner à ce sacrifice VOLONTAIREMENT. Mais je sais ce qu’il m’en coûte et je ne m’y abonnerai pas si jamais j’en ai le choix.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16373, f. 263-264
Transcription de Bénédicte Duthion assistée de Florence Naugrette et Gérard Pouchain

a) Juliette note mercredi alors que le 14 mars tombe un lundi et le 16 un mercredi.
b) « tout ».
c) « remord ».


Jersey, 15 mars 1853, [mardi]a après-midi 3 h. ¼

Quand je pense au peu de temps que je te verrai demain, mon doux bien-aimé, et au peu que je te verrai aujourd’hui, j’ai presque envie de pleurer de regret et de tristesse. Et pourtant, mon pauvre adoré, Dieu sait que je te veux heureux parmi les tiens et j’ai la raison de penser que mon tour ne peut, ne doit venir qu’après celui de ta famille. Aussi, ce n’est pas de la colère ni du mécontentement que j’éprouve loin de toi, c’est de l’ombre et du froid, comme lorsque le soleil a disparu et que l’âme s’engourdit. Ça n’est pas de ma faute si je suis ainsi, mais cela ne m’empêche pas de souhaiter que tu aies très beau temps demain et que tu sois bien heureux. Tâche, si tu rentres assez tôt pour cela, de venir me voir avant ton dîner, mais, dans tous les cas, j’espère que tu ne partiras pas le matin sans venir m’embrasser. D’ici là, mon Toto, tu pourrais me donner de bien doux moments encore si tu voulais. Tâche de vouloir car tu sais que VOULOIR C’EST POUVOIR, surtout en amour. En attendant, je broie de la migraine le plus que je peux et je te distille mon cœur goutte à goutte.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16373, f. 265-266
Transcription de Bénédicte Duthion assistée de Florence Naugrette et Gérard Pouchain

a) Juliette note mercredi alors que le 14 mars tombe un lundi et le 16 un mercredi.

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