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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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17 novembre [1839], dimanche matin, [illis.] [9 h  ?]

Bonjour, mon cher petit bien-aimé. Bonjour, mon adoré petit homme. Bonjour, mon Toto. Comment que ça va mon pauvre amour ? Tu étais éreinté cette nuit, aussi j’ai fait tout mon possible pour ne pas ajouter à ta fatigue mais je souffrais de te voir si las et si absorbé. Je me reprochais d’en être en grande partie la cause quoique cependant il ne soit humainement impossible de faire autrement. J’ai hâte [d’essayer de mon travail  ?]. Pour un rien je ferais un coup de tête et j’irais m’offrir au premier théâtre venu. La crainte de te déplaire m’arrête sans cesse mais il faudra bien cependant qu’il y ait une fin très prochaine à cet état de chose que ni toi ni moi ne pourrons supporter longtemps. Je t’en prie, mon Toto. Je t’en suppliea, mon petit homme. J’ai vu une lettre de [Masson  ?] cette nuit. Il paraît que tout le monde se mêle de cette cacadémie ? Les procureurs généraux, les ministres, [des  ?] sous-préfets, les rois et jusqu’au simple bureaucrate, tout le monde voudrait vous voir dans le glorieux fauteuil qui n’est pas même rembourré. Quant à moi qui par mon éducationb mon esprit et mes affections ne suis rien moins que CLASSIQUE, je ne dis rien, je laisse les autres pousser, tirer, hurler et blasphémer à leur façon sans m’en émouvoir davantage trouvant charmant que vous fassiez la figue à tous ces gens-là dont pas un ne va à votre cheville. Je t’aime et je voudrais que tu ne sois qu’à moi. Aussi je suis ravie que tu ne t’embarquesc pas dans une série de démarches qui auraientd pour résultat de t’éloigner de moi davantage. C’est déjà bien trop comme ça.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16340, f. 59-60
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Jean-Marc Hovasse

a) « suplie ».
b) Au-dessus de ce mot, Juliette a ajouté celui d’« orthographe ».
c) « t’embarque ».
d) « aurait ».


17 novembre [1839], dimanche soir, 4 h.

Je n’ai vu encore personne, mon amour, excepté Résisieux qui fait les quatre coups dans la maison dans ce moment-ci. Mais [de] Mme Pierceau, mais de chez Manière, aucune nouvelle. Si je pouvais avoir l’espoir de passer la soirée avec toi il me serait tout égal de rester seule comme un pauvre loup mais à défaut de toi j’aime à voir un visage humain à qui parler de toi. C’est ce qui fait que je compte les jours et les heures qui doivent m’amener Mme Pierceau. Il est possible que ne me voyant pas mettre les pieds chez elle depuis que je suis revenue, elle se pique et qu’elle reste chez elle, auquel cas je n’aurais qu’à me résigner et à me contenter de Résisieux pour toute conversation et pour tout épanchement. Tu ne comprends pas ces besoins-là, toi, parce que tu m’aimes sobrement et avec tempérance mais moi qui n’ai jamais assez de toi et qui t’aime avec passion et furie, je ne suis pas fâchée d’avoir quelquefois l’occasion de verser le trop-plein de mon amour et de mon admiration dans une oreille quelconque. J’aimerais mieux te voir. J’aimerais mieux te baiser. J’aimerais mieux courir les aventures avec toi mais il n’est pas question de ce que je préfère mais de ce qui peut me faire supporter ton absence. Je t’aime. Tâche de venir bientôt. Pense à moi, plains-moi et aime-moi. Jour Toto. Il y a bien longtemps que vous n’êtes venu déjeuner avec moi. Vous seriez bien ravissant de venir cette nuit. Je serai bien joyeuse.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16340, f. 61-62
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Jean-Marc Hovasse

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