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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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23 mars 1870

Guernesey, 23 mars [18]70, mercredi matin, 7 h. ¼

Cher bien-aimé, j’envoie mon bonjour le plus tendre au devant de ta bonne nuit pour l’en remercier et te féliciter. Si tu es déjà levé, comme c’est probable, tu dois voir en même temps que moi en ce moment même un étonnant effet de soleil, de nuages, et de pluie, sur Serk. Voilà près d’un quart d’heure qu’il dure et il ne paraît pas encore près de finir. Ce spectacle m’intéresse d’autant plus que je suppose que tu le regardes en même temps que moi. Mais, tout attrayant que soit ce ciel giboulard, il ne nous promet pas poire molle [1] pour le reste de la journée. Je n’en suis pas autrement fâchée car j’ai de quoi remplacer tous les soleils absents avec les deux articles de tes vaillants et prodigieux fils [2]. Je te prie bien tendrement de leur dire combien et comment je les admire et les remercie avec reconnaissance de leur bon souvenir à tous les deux. Je te fais la même prière pour ton cher P. Meurice quand tu lui écriras. Toi je t’adore.

BnF, Mss, NAF 16391, f. 83
Transcription de Jean-Christophe Héricher assisté de Florence Naugrette

Notes

[1Ne pas promettre poire molle : proférer de rudes menaces.

[2Sous le titre « Paris menacé », le 14 mars 1870, François-Victor vilipende dans Le Rappel le projet de décentralisation soutenu par les ministres orléanistes Guizot, Thiers et Barrot. Sous le titre « Chroniques révolutionnaires. Les Cachots de M. Ollivier », Charles Hugo a fait paraître dans Le Rappel du 20 mars 1870 un article protestant contre l’iniquité des conditions de détention, d’un côté, de Pierre Bonaparte, à la Conciergerie, de l’autre, des détenus politiques à la Santé ou à Mazas : le premier, assassin du journaliste Victor Noir et cousin de l’empereur, reçoit les siens et vit somptueusement en attendant son acquittement prévisible ; de l’autre, les opposants républicains accusés depuis février de comploter contre le régime sont traités avec une rigueur croissante, et privés non seulement de liberté de mouvement, mais aussi, fait nouveau, de liberté d’expression. Cet article lui vaudra une nouvelle condamnation à six mois de prison, d’où son départ hors de France en avril.

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