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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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21 janvier [1839], lundi matin, 9 h. ½

Bonjour, mon pauvre petit bien-aimé, bonjour, mon adoré. Je me reproche, mon Toto, d’avoir pris cette heure de plaisir des yeux, cette nuit, parce que je vois bien à présent que c’est aux dépensa de ton repos et de notre bonheur. Car il [est] probable que, sans elle, tu serais venu déjeuner avec moi ce matin ? Oh si on pouvait retourner en arrière, avec quelle joie je donnerais toutes les mascarades de cette nuit, les musiciens, la poussière, les directeurs et autresb pour voir une minute ta ravissante et belle figure, pour entendre ta voix, pour respirer ton haleine qui sent bon, pour t’adorer et pour mourir et vivre dans tes bras. Malheureusement, ça n’est pas possible et j’en suis réduite à regretter de n’avoir pas mieux employéc le temps que tu m’as donné cette nuit. Est-ce que tu me laisseras encore longtemps sans me donner du vrai bonheur de derrière les fagots ? Il y a longtemps que mes provisions sont épuisées et je commence à tirer une langue longue comme çad. J’ai faim et soif dee baisers et d’amour. Ne me laissez pas, mon Toto, mourir d’inanitionf quand vous avez en vous de quoi me ravitailler pour le reste de mes jours. Je t’aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16337, f. 77-78
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette
[Souchon]

a) « au dépend ».
b) « autre ».
c) « emploié ».
d) Dessin d’une langue :

© Bibliothèque Nationale de France

e) « des ».
f) « d’ination ».


21 janvier [1839], lundi soir, 5 h. ½

J’espère, mon petit homme, que vous ne vous promenez pas sous les gouttières depuis tantôt, surtouta si vous n’avez pas su vous procurer de parapluie ? Ça me tourmente beaucoup de vous savoir errant par ce temps-ci. J’aimerais mieux vous avoir au coin de mon feu ou dans mon lit. Je ne suis pas dégoûtée comme vous voyez, et je serais plus tranquille. Pourquoi ne comprenez-vous pas ça et pourquoi me laissez-vous me sécher et me dessécher en désirs et en amour inutiles puisque vous n’y répondez pas ? Je t’aime, mon Toto chéri, et j’ai bien besoin de bonheur, c’est-à-dire de toi, car c’est là tout ce que je veux et ce que je ne peux pas avoir. Je sais bien que c’est PEU DE CHOSEb et c’est ce qui en rend la privation si douloureuse et si [impossible  ?]. Je ris, mon Toto, ou du moins je fais tous mes efforts mais en dedans je suis triste et découragée, car je vois que plus j’ai de courage et de patience, et moins le bonheur me vient. Ça ne dépend pourtant que [de] toi, méchant homme. Et dire que je t’aime toujours autant, ce qui est pire que plus.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16337, f. 79-80
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

a) « sur tout ».
b) Expression occupant toute la largeur de la page.

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