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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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7 mars 1862

Guernesey, 7a mars 1862, vendredi matin, 8 h.

Bonjour, mon cher bien-aimé, bonjour d’autant plus doux et plus tendre que notre bonsoir a été plus troublé et plus agité. Je n’ose pas te demander des nouvelles de ta nuit qui, à en juger par la mienne, n’a pas dû être bien bonne. Je compte pour toi sur l’hydrothérapie à laquelle tu te livres avec énergie en ce moment-ci même, presque sous mes yeux, car je te vois presque tout entier malgré ta fenêtre fermée. J’espère que cette fois encore tu sentiras le bienfait de ce régime mi-partie d’eau et de crin. Quant à moi, mon pauvre bien-aimé, rien ne me va mieux que le STATU QUO qui n’est pas tout à fait la STASE, quoi que tu en disesb, car il est rare que je m’assoie dans toute la journée de seize heures plus de trois ou quatre heures. Il est vrai que c’est le soir, près de mon feu, et mes yeux fatigués sur un livre ou sur un journal sans aucune diversion, puisque mon premier soin est de respecter ton travail, dans cette situation. Il m’arrive quelque peu de somnolence de neuf à dix heures, c’est vrai. Il vaudrait mieux que cela ne fût pas, j’en conviens, mais le MIEUX dans ce cas, et comme tu l’entends, est l’ennemi du bien et va directement contre ton but. Crois-moi, mon cher bien-aimé, mieux vaut pour ma santé, et même pour ma vie, ne pas tant insister pour me forcer à tenir mes yeux ouverts quand l’excès de fatigue les ferme et ne pas tant taquiner cette pauvre nature qui a elle aussi son instinct de conservation que de l’exciter jusqu’à la douleur la plus cruelle par excès de sollicitude. La comparaison entre l’accident très léger survenu à ta femme n’a rien qui ressemble à ce que j’ai ni aux habitudes réglées de ma vie. Ta femme passait la moitié des nuits, buvait et mangeait par entraînement. Chez moi, rien de tout cela. Et puis, pardonne-moi comme je te pardonne. Je t’aime.

BnF, Mss, NAF 16383, f. 59
Transcription de Véronique Heute assistée de Florence Naugrette

a) « 6 » corrigé en « 7 » par une autre main.
b) « dise ».

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