27 mai 1872

Paris, 27 mai [18]72, lundi, 2 h. après midi

J’accepte avec joie, mon grand bien-aimé, et je serai prête à 3 heures. Le temps n’est rien moins que stable mais je m’en inquiète peu. Être avec toi, voilà ce qui me plaît plus que tous les rayons de soleil possibles. J’ai pris un bain ce matin et m’en trouve très bien jusqu’à présent. J’espère pouvoir marcher un peu ; au reste tu jugeras toi-même de mon ingambilité. Quant à celle de Petite Jeanne j’ai pu l’apprécier ce matin à travers mes carreaux. Jamais je n’ai vu d’aussi petites pattes courir si vite. Georges courait aussi lui à l’avant, donnant la main à sa bonne, Petite Jeanne donnant la main à sa mère. Il paraît que tout ce monde-là allait dîner chez la petite cuisine [1] à ce que m’a dit Suzanne. Quel que soit le lieu où ils allaient tous si allègrement, je leur ai souhaité plaisir et joie et leur prompt retour vers toi. Cher bien-aimé, tu as eu la bonté d’indiquer un nom pouvant servir à l’enfant de Louis [2] à quelque sexe qu’il appartienne. J’ai été bien attendrie et bien touchée de ton choix et bien fière aussi, mais je le serais encore bien davantage si tu daignais y joindre un petit mot baptismal qui bénisse l’enfant en même temps qu’il honorera à tout jamais l’humble famille dont il est né. Cependant si tu y vois la moindre objection, je retire ma demande et je te prie de me pardonner mon indiscrétion. Je t’aime.

BnF, Mss, NAF 16393, f. 147
Transcription de Guy Rosa