Paris, 29 juillet [18]72, lundi soir, 3 h. ½
Je t’aime et j’ai chaud voilà les deux seuls mots qui surnagent aujourd’hui dans mon cœur et dans ma pensée. Je suis tellement abrutie et anéantie par cette température californienne que je ne sais plus que devenir. Je n’ai de courage à rien si ce n’est à t’aimer. Mais cela ne dépend ni du thermomètre ni du baromètre donc je ne leur en ai ni reconnaissance ni rancune. Enfin si ce temps-là continue encore quelques jours j’en crèverai voilà ce qui est sûr. Je ne sais pas ce que tu as décidé pour le pique-nique de demain mais si j’avais voix au chapitre je m’abstiendrais d’y aller tant le moindre mouvement corporel me fait horreur. Cependant je ferai ce que tu voudras, trop heureuse que cette petite distraction t’agrée en même temps qu’elle comblera de joie tout ton gouma et les tribusb qui y sont mêlées. Donc mon cher adoré, à toi de décider, ce que tu fais sera bien fait. Madame d’Alton a envoyé savoir tantôt si elle pouvait venir te voir ce soir. J’ai répondu que oui. Ai-je bien fait mon maître ?
BnF, Mss, NAF 16393, f. 217
Transcription de Bulle Prévost assistée de Florence Naugrette
a) « goume ».
b) « tributs ».