Paris, 17 juin 1881, vendredi matin, 8 h.
Comme toi, mon pauvre bien-aimé, j’ai passé une nuit archia médiocre. Mais comme moi, heureusement, tu n’es pas tiraillé par des souffrances sans nomb [1]. Dors, mon grand, mon très cher grand homme, afin que ta santé se raffermisse de plus en plus pour le bonheur et pour la gloire de l’humanité.
J’espérais que tu pourrais t’occuper un peu hier des lettres qui urgent et qui hurlent dans mon secrétaire attendant une réponse mais tu n’as pas eu le temps de leur donner un coup d’œilc sérieux. Je doute fort qu’il en soit autrement aujourd’hui surtout si tu vas au Sénat, comme d’habitude, c’est-à-dire de quatre à cinq heures.
Je regrette que tu ne veuillesd pas user de l’argent que tu m’as donné en réserve pour nous permettre d’aller à Saint-Mandé. Depuis que nous sommes rentrés en France, je n’ai jamais manqué de faire ce mois-ci mon doux et triste pèlerinage à la tombe de ma pauvre bien-aimée [2]. Il serait bien dur pour moi qu’une question d’argent, que tu peux si facilement résoudre, m’empêche de remplir ce pieux devoir cette année. Penses-y, mon grand bien-aimé, et tâche de me donner cette sainte consolation. D’avance je t’en remercie et je te bénis.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16402, f. 132
Transcription de Caroline Lucas assistée de Florence Naugrette
a) « archie ».
b) « noms ».
c) « oil ».