Bruxelles, 26 août [18]67, lundi, 8 h. du m[atin]
Si tu as bien passé la nuit, moi aussi ; si tu es heureux, moi aussi ; si tu m’aimes, je t’adore.
Je viens déjà de constater qu’il n’y a que ton manuscrit dans le fond de la petite malle qui contient mes nippes et celles de Suzanne pour notre villégiature à Chaudfontainea [1]. Donc il faudra que tu achètes du papier aujourd’hui si tu veux en emporter. Je crains que le blanchisseur de l’hôtel ne puisse pas rendre mon linge pour demain matin, ce qui diminuera sensiblement ma provision déjà très succincteb de chemises, de bas et de mouchoirs. Mais cela m’est égal, pourvu que je ne retarde pas d’une minute l’entrée en campagne de toute ta famille. Je me fais une joie d’avance de causer avec Monsieur Georges. Je me suis déjà inscrite pour être sa première dame de compagnie, à ce doux et triomphant petit être. En attendant, j’en rabâche de bonheur comme une bonne vieille grand-mère que je pourrais être. Il fait un temps merveilleux et qui durera tout l’automne je l’espère, ce qui n’empêche pas Suzanne de soupirer après son cher petit Guernesey. Quant à moi, je suis heureuse partout où tu es heureux. Mon horizon préféré et béni, c’est toi. Tout le reste, c’est du décor.
BnF, Mss, NAF 16388, f. 221
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
a) « Chauffontaines ».
b) « succinte ».