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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 21 octobre [18]63, mercredi matin, 8 h.

Bonjour, mon cher petit bien-aimé, bonjour de tout mon cœur, bonjour. As-tu passé une bonne nuit ? Tes gencives sont-elles tout à fait guéries ? Es-tu moins fatigué et moins agacé qu’hier ? M’aimes-tu… comme j’ai besoin d’être aimée ? Si tu peux répondre à chacune de ces questions comme mon âme le désire, je serai bien contente, bien tranquille, bien heureuse et bien reconnaissante. En attendant le temps est à souhait et la mer aussi, ce matin, il est donc probable que ton fils arrivera tantôt [1]. Sa présence fera une heureuse diversion à toutes les inquiétudes et à toutes les tristesses qui te harcèlent depuis quelque temps, c’est pour cela que je hâte son retour de tout mon cœur. Je compte beaucoup sur la tendresse et la gaîté délicate de ce brave et charmant fils pour te donner toute satisfaction d’esprit et de bonheur. Quant à moi j’attends avec une certaine anxiété mes pauvres Bretons qui ne sont rien moins qu’amusantsa [illis.]. Cela me serait fort égal si tu ne devais pas forcément en supporter l’ennui chez moi tout le temps qu’ils seront ici. La pensée d’ajouter quoi que ce soit au poids de ta vie me rendraitb féroce et dénaturée même pour mes proches les plus proches. J’espère qu’ils ne resteront pas longtemps et que tu n’auras pas trop à en souffrir [2]. Jusque-là, mon cher bien-aimé, il faut tâcher de te bien porter et de te distraire afin de pouvoir reprendre tes travaux qui sont l’essence même de ta vie. Je dis mal ce que je veux dire mais tu as l’habitude de déchiffrer mes pensées et de lire mon âme couramment et je suis sûre que tu me comprends toujours quand je te dis : je t’aime.

BnF, Mss, NAF 16384, f. 231
Transcription de Gérard Pouchain


a) « amusant ».
b) « rendrais ».

Notes

[1« Il est midi ½. Victor arrive en ce moment par le Weymouth. » (Agenda de Victor Hugo, 21 octobre)

[2La sœur et le beau-frère de Juliette ont annoncé leur visite.

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