Jersey, 13 mai 1855, dimanche après-midi, 2 h. ½
J’espérais que tu me ferais profiter de l’occasion de la réunion voisine pour me dire un petit bonjour mais je me suis trompée car voici l’heure déjà très dépassée et tu n’es pas venu. Maintenant il n’y a plus pour moi d’autres chances que celle de ce soir et je l’attends avec impatience. Cher petit homme, je n’ai pas pu te faire ta commission pour le marchand de bière bien correctement parce qu’il n’était pas chez lui hier au soir, qu’il ne sait pas un mot de français, ni ceux qui servent dans le cabaret. J’avais prié une des filles du Heaume de s’informer du contenant des petits barils et du prix. Elle m’avait promis de le faire mais jusqu’à présent, je ne l’ai pas revue. Quant à Suzanne, ce n’est pas la bonne volonté qui lui manque, mais son intelligence, ayant les mêmes travers que son nez, il lui est très difficile d’entendre droit et de s’expliquer de même. D’ailleurs, aujourd’hui dimanche, on n’aurait pas pu t’en porter dans tous les cas. Il faudra en outre que tu fasses acheter une cannellea ou robinet pour tirer au tonneau car cet accessoire ne regarde pas le marchand de bière. Voilà ce que je sais positivement. Tout cela n’est guère bien tiréb à clair mais n’empêche pas que je ne t’aime de source et que je ne te baise à torrent. Sur ce, je vais finir de copire de la bonne encre. Tâchez d’arriver à temps pour m’en donner d’autres de COPIRES.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16376, f. 199-200
Transcription de Magali Vaugier assistée de Guy Rosa
a) « canelle ».
b) « tirer ».