Guernesey, 8 juillet 1862, mardi, 4 h. ½ après-midi.
Craignant de faire attendre M. Bacot et la nécessité de faire tout mon ménage avant de m’habiller, je n’ai pas pu te donner ce matin ma chère petite restitus matinale. Mais sois tranquille, mon trop bien aimé, mon amour n’y a rien perdu, AU CONTRAIRE, tant il est vrai que tous les instants de la vie sont une succession non interrompue et toujours de plus en plus tendre et plus enthousiaste de mon amour et de mon admiration pour toi. Tu me tiens aux entrailles comme mon enfant, tu me passionnes comme mon amant, tu m’éblouis et tu m’électrises comme un Dieu fait homme. Je t’aime en te souriant et en t’apaisant quand tu souffres ; je t’aime jalousement et jusqu’à la mort quand je crois que tu peux m’en préférer une autre ; je t’aime à genoux et en te bénissant quand je considère ta nature sublimementa grande et divinement bonne, enfin je t’aime, je t’aime, je t’aime !!!
Tu m’as paru un peu fatigué tantôt, mon pauvre éprouvé, j’espère que tu auras ce soir un peu de raison de te détendre au milieu de tant d’amour de vénération d’admiration et d’adoration. En attendant je t’envoie mon âme avec la branche d’olivier pour toi et pour tous ceux que tu aimes.
BNF, Mss, NAF 16383, f. 174
Transcription de Camille Guicheteau assistée de Guy Rosa
a) « subliment ».