Guernesey, 30 novembre 1861, samedi matin, 8 h.
Bonjour, mon doux bien aimé, bonjour mon génie de somme, bonjour. Je t’aime et je te souris, je t’adore et je te bénis. J’espère que tu as bien dormi et que tu te portes bien et je t’en remercie comme d’une bonne action volontaire faite à mon intention et dans le but de me donner à moi-même santé, joie et bonheur. Je pense que tu vas avoir aujourd’hui un déluge de bonnes nouvelles, y compris le retard de l’arrivée de M. Lacroix sur lequel tu comptes pour finir tranquillement le classement de ton merveilleux livre. Quant à moi, je le désire aussi pour toi, de tout mon cœur parce que rien ne m’est plus insupportable que de te savoir tiraillé et surchargé de toutes parts. Aussi, est-ce à mon cœur défendant que je t’ai fait hier la commission de ta bonne petite belle-sœur et de ton petit Toto [1]. Je regrette d’autant plus de l’avoir faite qu’elle n’a pas réussi et que je t’ai tourmenté pour rien. J’en ai dit deux mots hier, à cette charmante petite bonne femme et j’ai tâché de ne pas trop l’attrister, en lui disant ce qui m’effrayait, que tu ne pourrais donner aucune réponse définitive dans ce moment-ci. Puisses-tu lui donner celle qu’elle désire et dont son mari paraît avoir tant besoin, dès que tu seras sorti de ta grande presse. En attendant, je t’adore. Je voudrais savoir tout le monde heureux par toi.
J.
BnF, Mss, NAF 16382, f. 166
Transcription de Sophie Gondolle assistée de Florence Naugrette