11 mars [1849], lundi matin, 7 h. ½
Bonjour, mon doux bien-aimé, bonjour ; que le sommeil te soit bienfaisant et qu’il te montre en rêve la pauvre femme qui t’aime comme son ange consolateur, te bénissant et appelant sur toi et sur tous ceux que tu aimes toutes les joies et tous les bonheurs de ce monde.
Je vais aller à Saint-Mandé [1] ce matin ; j’espère et je suis presque sûre d’être revenue assez tôt pour te conduire. Cependant si je devais avoir le malheur de te manquer je veux préparer avant de m’en aller tout ce qu’il te faut : du bouillon pour ton estomac et l’eau pour tes yeux. Il me semble que ce que je te prépare moi-même s’imprègne du désir et de la volonté que j’ai de te faire du bien. C’est pourquoi je tiens tant à ne pas laisser faire toutes les petites choses qui sont destinées à ta santé par d’autres que par moi. C’est une superstition trop douce pour offenser le bon Dieu et j’y attache une très grande importance. Cher adoré, pense à moi quand tu te réveilleras, pense à moi quand tu verras auprès de toi ta belle famille heureuse, pense à moi toujours pour que les battements de mon cœur ne s’arrêtent pas. Je t’aime comme je te respire. Mon amour, c’est ma vie, mon bonheur, c’est toi.
Juliette
MLM, 3278
Transcription de Gérard Pouchain