Samedi, 10 h. du soir
Sept[embre] [18]34a
[Après le 6 juillet 1834]b
« Car il avait de mauvaises
habitudes d’éducation qui
dérangeaient sa dignité
naturelle plus souvent qu’il
n’aurait fallu. »
Claude Gueux, V. H. [1]
Moi aussi, j’ai de mauvaises habitudes d’éducation qui dérangent ma dignité naturelle plus souvent qu’il ne faudrait. C’est que, moi aussi, j’ai à me plaindre du sort et de la société. Du sort parce qu’il m’a jeté dans une condition au-dessous de mon intelligence, de la société qui me retranche chaque jour de la portion d’amour et de bonheur que tu partages si généreusement avec moi, mon Albin [2] bien-aimé. Oh ! je t’aime plus encore depuis que j’ai été ingrate envers toi. Oh ! je t’estime et je te respecte plus encore depuis que j’ai été injuste et coupable envers toi. Pardonne-moi.
« N’est-ce pas, l’amour rend bien méchant ? » Marie Tudor V. H. [3]
Mon bien-aimé, mon Victor, ne m’abandonne pas. Aime-moi. Si je meurs avant le terme, je veux qu’on te porte mon cœur, comme le pauvre Claude fit à Albin de son dernier morceau de pain, le dernier jour de sa vie [4]. Moi, je veux qu’on te porte mon cœur que tu dois posséder au-delà même de ma vie.
Aime-moi, pardonne-moi, fais de moi ce que tu voudras. Je t’aime.
Ici ma vie / Là mes baisersc
Partout mon amour
Juliette
[Adresse]
À toi mon bien-aimé
BnF, Mss, NAF 16322, f. 204-205
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
[Souchon, Blewer]
a) Date rajoutée sur le manuscrit d’une main différente de celle de Juliette.
b) Date indiquée par Evelyn Blewer.
c) Ces deux phrases sont chacune entourées :
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