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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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21 février [1849], mercredi matin, 10 h.

Ton cœur a répondu à mon cœur, mon adoré, et ta pensée est venue consoler et réconforter ma pauvre âme découragée. Je te remercie avec reconnaissance, avec joie, avec des larmes de tendresse et d’amour, de l’adorable petite lettre que tu m’as écritea hier. Mon cœur la désirait sans oser l’espérer. Merci, mon adoré, merci. Tu as comblé par d’éloquentes et d’ardentes paroles d’amour le déficit que ton absence faisait à mon bonheur. Sois béni, mon bien-aimé, pour cette bonne pensée. Je ne peux pas t’aimer davantage parce que depuis longtemps mon amour a dépassé toutes les limites du possible et de l’impossible, mais je puis être plus ou moins heureuse selon [ce] que tu me témoignes de tendresse et je suis bien heureuse aujourd’hui. Ô oui bien heureuse. Quand ta lettre m’est arrivée tout à l’heure, j’ai cru sentir dans mon cœur s’ouvrir le ressort de la joie et du bonheur et j’ai senti tout mon être s’emplir d’un ravissement ineffable. Merci, mon cher petit homme d’avoir pensé à consoler de ton absence la pauvre femme dont tu es la vie. Cette pensée adorable portera bonheur à notre amour, j’en ai la douce conviction.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16367, f. 17-18
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Jean-Marc Hovasse
[Pouchain]

a) « écrites ».


21 février [1849], mercredi soir, 11 h.

Puisque j’ai la plume dans les doigts et le cœur dans la main, je ne vois pas pourquoi je n’en profiterai pas pour en extraire un peu de bonne tendresse à votre intention ? D’abord cela me déchargera un peu la conscience, ce qui n’est pas à dédaigner au moment de s’aller coucher, ensuite je me ferai plaisir, ce que je saisis toujours avec un empressement digne d’un meilleur style. Enfin je fais ce que je peux pour me donner du bonheur, ce n’est pas ma faute si je n’y parviens pas. Cependant aujourd’hui la tâche m’a été rendue facile avec le secours et l’aide de votre bonne lettre adorée. Vrai je ne regrette pas mes quatre sous ou si vous l’aimez mieux mes vingt centimes. Je suis toute prête même à faire un abonnement à l’année si vous y consentez. Mes moyens me le permettent, voyez si vous voulez y consentir. Je mettrai même quelque chose de plus si vous l’exigez. En attendant vous avez un fameux gilet à la Robespierre, mâtin de chien, quel chic révolutionnaire. Je ne vous croyais pas si Barbès que cela. Il ne vous manque plus que le grand sabre pour être tout à fait crâne. Je ne sais pas où vous allez avec ce costume triomphant, mais je sais que j’aurais bien voulu rester avec vous et voir ce qu’il y avait dessous ce vêtement montagnard et provocateur. Si cette curiosité vous paraît familière et indiscrète, ne vous en prenez qu’à mes idées éminemment défiantes et réactionnaires et baisez-moi pour la peine depuis la tête jusqu’où vous voudrez.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16367, f. 19-20
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Jean-Marc Hovasse
[Pouchain]

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