Guernesey, 15 sept[embre 18]78, dimanche matin, 7 h.
Quoiqu’a en retard, mon grand Petit homme, j’espère que mon bonjour devancera encore le tien parce qu’il est nécessaire que tu dormes mieux et plus longtemps que moi qui n’ai rien à faire qu’à t’aimer jour et nuit, tandis que toi tu entasses chefs-d’œuvreb sur chefs-d’œuvre. Et à ce propos, il va falloir que tu fasses les deux dessins que tu as promis depuis si longtemps à ton fervent admirateur et ami Paul de Saint-Victor [1]. Il n’y a plus moyen de différer maintenant qu’il est venu les chercher jusqu’ici. Tu feras bien d’y consacrer une de tes matinées, l’après-midi étant d’ordinaire pris par notre promenade quotidienne. Pendant que j’y pense, je crois que tu ferais bien d’indiquer, pendant le peu de temps que ces aimables hôtes sont ici, les itinéraires de nos excursions dont le choix n’est pas indifférent quand on n’a pas, comme nous, eu le temps de les connaître tous, depuis le premier buisson jusqu’à la dernière pierre. Cela dit, je rentre dans ma passivité pour t’adorer à loisir et de toute mon âme.
Monsieur
Victor Hugo
Hauteville House
Syracuse
Transcription Gérard Pouchain
[Barnett, Pouchain]
a) « quoi qu’ ».
b) « chef-d’œuvres ».