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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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23 janvier [1839], mercredi matin, 11 h.

Bonjour, mon pauvre bien-aimé, bonjour, toi que j’aime à genoux, bonjour, je t’aime, je t’aime. Comment vont tes yeux, mon adoré ? Comment vas-tu de corps et d’âme, de santé et d’amour ? Je te désire, je t’attends, avec toute l’impatience d’une femme qui aime et qui crainta pour la santé de son amant bien-aimé. Je ne peux pas te dire, mon Toto, à quel point les nuits que tu passes m’inquiètent et me tourmentent. Je voudrais les passer avec toi, mes lèvres sur tes pieds, mes yeux sur tes yeux. Je voudrais réchauffer tes pieds et brûler ton âme. Je t’aime, je t’aime, pauvre bon ange adoré. Quand donc viendras-tu déjeuner avec moi ? Voici ce que je veux pour mes étrennes : c’est un dîner au cabaret, n’importe lequel depuis la gargoteb jusqu’au ROCHER [1], tout m’est [bon  ?] pourvu que ce soit avec toi. Ne me refuse pas cette grâce, mon Toto, tu sais bien que tu me dois mes étrennes. Permets-moi de les manger avec toi à la SAUCE que tu voudras. Je vais écrire à Mme Lanvin pour qu’elle me cherche une bonne et qu’elle me dise où en est la pension et Mr Pradier. Je vais écrire aussi à Mme Krafft et à Claire. Mais que je t’aime donc mon Dieu. Je t’adore.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16337, f. 85-86
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

a) « crains ».
b) « gargotte ».


23 janvier [1839], mercredi soir, 5 h.

Mon petit homme, mon petit homme chéri, je t’attends, je t’aime. Sens-tu cela ? Je trouve les heures bien lentes et la journée bien longue. Je voudrais te voir, je voudrais entendre ta voix, je voudrais baiser tes belles dents. Mes yeux, mes lèvres, et mon âme ont besoin de toi. Je t’adore. J’ai chez moi la petite Besancenot qui gazouille comme un oiseau. Je laisse aller mes pensées et mon cœur vers toi pendant ce temps-là, sans m’arrêter une seconde à rien de la vie qui n’est pas toi. Je ne sais pas comment je te dis ce qui passe en moi, j’ai trop d’amour pour songer à l’arranger en idées, en mots, en phrases, qui signifient quelque chose. Je ne sais que t’aimer, c’est bien assez, n’est-ce pas mon adoré ? Est-ce que tu me laisseras encore longtemps seule ? Est-ce que tu ne viendras pas demain déjeuner avec moi ? Est-ce que tu ne me donneras pas bientôt à dîner au cabaret ? Est-ce que tu ne me donneras pas tout de suite du bonheur et de l’amour, j’en ai tant besoin ?

Juliette

BnF, Mss, NAF 16337, f. 87-88
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Le Rocher de Cancale était l’un des restaurants huppés de Paris à cette époque.

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