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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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22 décembre [1845], lundi matin, 10 h. ¼

Bonjour, mon petit bien-aimé, bonjour, mon adoré petit homme, bonjour, mon pair de France, bonjour, vous qui n’êtes pas maire et qui avez des enfants, bonjour, vous, bonjour, toi, bonjour, tout ce qui me plaît et tout ce que j’aime le plus au monde. Je voudrais bien sortir avec vous si vous vouliez m’emmener. Il fait presque beau et j’aurais tant de bonheur à courir les rues avec vous que vous seriez bien gentil de faire tout votre possible pour me faire sortir soit aujourd’hui, soit un autre jour.
Voilà ma péronnelle rebouclée jusqu’à l’année prochaine. Je lui ai fait tous les sermons que je pouvais lui faire indirectement puisque je ne pouvais pas aborder la question franchement. Je ne sais pas ce que cela deviendra, l’important est qu’elle se maintienne honnête et pure. Je n’ai pas une confiance aveugle dans l’indulgence et la bonté de Mme Marre. Je fais bien la part de son caractère et celui de ma fille. Ce sont deux femelles qui se ressemblent trop pour ne pas se piquer mutuellement. Quand cela deviendra trop fort, je la remettrai avec sa sœur la douce et digne Mlle Hureau. Mon regret le plus vif est qu’elle ne soit pas toujours restée avec elle. Pardon, mon Victor, je te dis là des rabâcheries inutiles et que tu sais aussi bien que moi. Tout cela pour ne pas te dire toujours la même chose, c’est-à-dire que je t’aime de toute mon âme.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16361, f. 285-286
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette


22 décembre [1845], lundi soir, 4 h. ½

Mon cher petit bien-aimé, ma pensée, mon cœur, mon âme sont avec toi, mais tu ne me donnes rien en échange de tout cela, ce qui fait que je suis bien triste et bien seule. Je t’attends malgré l’affreux temps qu’il fait parce que je sais que ce n’est pas un obstacle à ce que tu sortes, au contraire. Je t’attends, mon Victor, ce mot dit tout ce qu’il y a en moi de souffrant et d’impatient, de triste et de tendre. Je t’attends et je t’aime.
Je n’ai pas trouvé ta jolie petite clef. J’aurais été pourtant bien heureuse de te la rendre. J’espère qu’on l’aura retrouvée chez toi, quoique tu craignissesa hier de l’avoir perdue dans la rue. Si j’en avais une qui pût te servir et qui fût encore plus jolie que l’autre, je te la donnerais tout de suite, mais je n’en ai pas. Je n’ai que mon grand couteau et ma belle guipure que je .......b garde  ! Je n’ai pas du tout besoin de me [dépouiller  ?] pour vos beaux yeux, d’autant plus que ce n’est plus pour moi qu’ils reluisent. Je ne vous donne pas de jolie clef parce que je n’en ai pas. Je ne vous donne pas de grand couteau et de belle guipure parce que je les garde. Ainsi vous avez le choix, mais surtout dépêchez-vous de venir, car j’attends après vous pour vous baiser sur toutes les coutures et autre part encore. Je vous adore.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16361, f. 287-288
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « tu craignisse ».
b) Huit points / tirets séparent le sujet du verbe.

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