Guernesey, 6 juilleta, [18]70, mercredi matin, 5 h. ½
Bonjour, mon cher bien-aimé, et bonjour aussi à Petite Jeanne quand vous serez éveillés, car j’espère que vous pioncez encore tous les deux à qui mieux mieux. Quant à moi, j’ai pris depuis quelque temps l’habitude de me réveiller à quatre heures, ce dont je ne me plains pas puisque cela me permet de lire Le Rappel [1] et surtout les articles hors lignes de tes deux fils à tête reposée. Aujourd’hui, celui de ton Charles sur l’Internationale. Est-il assez flamboyant et amusant ! Flourens dans le mur d’Olivier, Assi dans l’armoire de Schneider et Lepet dans l’alcôve de Napoléon III [2] ! J’en passe et des meilleures parce qu’il faudrait rappeler depuis le premier mot jusqu’au dernier de cet admirable article. Cette lecture si saine a le don de me ravigoterb jusque dans l’âme. Toutes les morosités de la nature et de l’esprit disparaissent devant ce radieux soleil d’esprit. Sans compter qu’il a les deux plus beaux enfants de la terre [3] et qu’il est ton fils ! Toutes les raisons du monde pour que j’en raffole. J’espère que le temps ne s’opposera pas à ce qu’ils reviennent tous samedi prochain [4]. En attendant je suis bien aise d’avoir ouvert ma maison à l’aimable Mme Oliver [5] qui justifie toute la sympathie que tu lui accordes [6]. Tout cela fait que je t’aime, je t’aime, je t’aime !
BnF, Mss, NAF 16391, f. 184
Transcription de Anne-Estelle Baco assistée de Florence Naugrette
a) « juin ».
b) « ravigotter ».