Guernesey, 22 janvier [18]70, samedi, 3 h. après midi
Tu sais mon cher bien-aimé, que je ne veux pas que tu suives mon mauvais exemple en ne dormant pas bien toutes les nuits. Je te le défends absolument quand je devrais pioncer jour et nuit comme une bûche pour te forcer à faire de même. En attendant que tu t’exécutes de bonne volonté j’ai lu pendant mon déjeuner l’admirable, admirable, admirable et généreux article de ton Charles. C’est beau et c’est bon comme lui, c’est tout dire. Au tour de ton petit Victor maintenant [1]. Lui aussi ne laisse rien à désirer comme talent, comme esprit et comme cœur dans tout ce qu’il écrit. Ce sont les deux héros parmi ce groupe de vaillants du Rappel et il semble en les lisant qu’on s’honore et qu’on se grandit soi-même. Tant pis si je dis mal ce que je sens si bien. Je les admire et je les aime. Je te bénis et je t’adore.
BnF, Mss, NAF 16391, f. 23
Transcription de Jean-Christophe Héricher assisté de Florence Naugrette