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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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22 juin 1840

22 juin [1840] lundi, 2 h. après midi

Je t’aime mon Toto. Tu es beau comme les fleurs de ton jardin, tu sens bon comme elles et tu es bon comme le bon Dieu. Je t’aime ma joie, ma vie, mon tout. J’avais par avance payé ma dette de gratitude à ces bons petits enfants. Aussi ce que ce cher petit Toto [1] a fait pour mon bouquet hier au soir n’était que justice. J’attends le Dabat tout à l’heure, je tâcherai de bien m’expliquer pour les souliers et je lui offrirai de reprendre les autres mais sans espoir qu’il y consente. Je vais envoyer chez Carcel tout à l’heure, outre ma visite de l’autre jour je lui écris de bonne encre pour lui faire remarquer que sa lampe n’a pas même fait son service d’hiver bien qu’elle eût été arrangée à neuf à la fin de l’automne. Enfin je fais mon petit commerce de femme de ménage : je viens d’écrire mon linge, de compter ma dépense et je t’écris. J’ai fait en outre ta tisanea mais aussi je suis sale à faire peur au diable. Garde à vous. Le bottier vient de venir, il a parfaitement compris ce que je lui ai dit. Il va te faire une paire de souliers soit en lasting [2] soit en coutil [3] ce qui sera le plus solide, il t’arrangera en même temps tes brodequins. Quant à tes souliers s’il a l’occasion d’en faire une paire pour quelqu’un de ton pied il reprendra les tiens sinonb NON. Je m’en doutais. Vous devriez bien pour me récompenser de tous mes travaux me faire sortir n’importe où ça m’est égal, je respecte tous les cercles de feu, pourvu que je sois avec vous. Aujourd’hui j’ai très mal à la tête et je suis sûre que cela me ferait du bien si tu me faisais marcher un peu. Je ne suis pas encore débarbouillée ni peignée mais si tu venais je passerais par-dessus tout ça, je ferais le tout petit [pas ?peu ?], je n’en ferais même pas du tout. Mais vous ne voulez pas, eh ! bien vous êtes un vieux méchant et je ne raccommoderaic plus vos affaires. Voime, voime, baisez-moi je vous aime trop.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16342, f. 227-228
Transcription de Chantal Brière

a) « tisanne ».
b) « si non ».
c) « racommoderai ».

Notes

[1Il s’agit de Victor, le fils cadet.

[2Lasting : « Étoffe de laine rase, satinée, unie ou à rayures, et utilisée notamment pour la confection de vêtements masculins. » (ATILF)

[3Coutil : « Toile de chanvre, de lin ou de coton, d’un tissage croisé, fortement serré, propre à faire des tentes, des enveloppes de matelas, d’oreillers, etc., ou à confectionner certains vêtements. » (ATILF)

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