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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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10 août 1852

Jersey, 10 août 1852, mardi matin, 7 h.

Bonjour, mon…….. suspendu entre deux baisers… et le reste. Je reprends mon gribouillis à peine commencé dans la même disposition de cœur mais avec une joie infinie et un bonheur immense de plus. Vous voyez bien, mon cher petit homme, que rien ne vous serait plus facile que de venir me voir le matin, si le cœur vous en disait. Ce qui n’est qu’une exception humiliante pourrait devenir une habitude triomphante si vous vouliez. En attendant, je suis trop heureuse pour être bien sévère envers vous. Je veux au contraire vous encourager dans la bonne voie en ne vous chicanant pas sur le plus ou moins d’empressement que vous mettrez à me rendre heureuse. Nous verrons si la vue de l’océan vous inspirera mieux que la grande place de Bruxelles et si mon cottage sera plus fêté que la chambre du passage Saint-Hubertc [1]. Pour cela je vais me mettre tout à l’heure en quête d’un logis dans votre voisinage. Dieu veuille que j’en trouve un dans mes moyens. Je ne sais pas pourquoi j’ai peur que cela ne soit très difficile pour moi. Du reste je vais en avoir le cœur net tout à l’heure. D’ici là il est bien inutile de faire des conjectures désagréables d’avance.
Cher petit homme, mon cœur nage en ce moment dans l’extase et le ravissement. Il y a bien longtemps que cela ne lui était arrivé. L’espérance montait et descendait autour de lui comme une marée en laissant toujours mon bonheur à sec. Mais, aujourd’hui, grâce à votre visite matinale, je suis à flot de toutes parts. Je suis heureuse, confiante et gaie, de triste, de jalouse et de maussade que j’étais. Seulement il ne faut pas me laisser trop longtemps sur cette impression sans la renouvelerd. Un bon déjeuner ce matin ne prédispose que mieux l’estomac au bon dîner de tantôt et j’ai un cœur très vorace comme vous savez. À tantôt donc, mon amour béni, si tu peux ; à bientôt le reste. À toujours mon adoration pour toi.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16371, f. 203-204
Transcription de Bénédicte Duthion assistée de Florence Naugrette
[Souchon, Massin]

a) 8 points de suspension.
b) 3 points de suspension.
c) Souligné deux fois.
d) « renouveller ».

Notes

[1À Bruxelles Juliette louait une chambre dans l’appartement des Luthereau situé dans les galeries du prince (no 10) passage Saint-Hubert.

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