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Bruxelles, 10 janvier 1852, samedi soir, 4 h.

Je n’ose pas me flatter d’un nouveau sursis pour cette nuit, mon cher petit homme, mais je serais bien heureuse si tu pouvais penser qu’il serait plus sage, plus prudent et plus propre de ne coucher chez toi qu’après la fumigation de tes dégoûtantes compagnonnes. M. Luthereau irait demain brûler du soufre^a chez toi et lundi tu pourrais y coucher sans inconvénients pour ton repos et pour ta gorge à laquelle l’odeur trop âcre du soufre pourrait faire mal. Je te soumets cela mon bon petit homme dans un sentiment très intéressé et pourtant plein de sollicitude pour toi. Tu en feras ce que tu voudras ou plutôt ce que tu pourras car tu es seul juge et bon juge du degré de latitude que tu peux prendre vis-à-vis les ridicules exigences de la police belge. Je te répète seulement que si tu peux encore me donner ces deux dernières nuits tu me combleras de joie en étant fort désagréable à mesdames les punaises qui ont élu domicile chez toi. Voilà, mon doux adoré, maintenant baisez-moi et ne vous souvenez plus de mes stupidités de ce matin. De votre côté, mon adoré petit Toto, quand vous me voyez dans mes crises d’inepties et d’impatience ne m’excitez pas par des raisonnements fort ingénieux mais qui ne font que redoubler mon agacement et ma stupidité. Maintenant pardonnez-moi et venez bien vite car je commence à trouver que vous êtes bien long dans vos réceptions et dans vos visites. Toto prenez garde à vous malgré les trois postes qui veillent sur vous car je foncerai sur vous au moment où vous vous y attendrez^b le moins.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16370, f. 13-14
Transcription de Bénédicte Duthion assistée de Florence Naugrette

a) « souffre ».
b) « attendrai ».