Guernesey, 16 mai 1862, vendredi matin, 7 h.
Bonjour, mon bien-aimé, bonjour, je t’aime, je te souris, je te bénis, je te vénère, je t’admire, je t’adore. Il m’est impossible de trouver en moi autre chose à te dire car mon amour me remplit toute et ma pensée ne voit rien au delà. Je ne sais pas quelles seront les nouvelles que tu recevras aujourd’hui, mais je suis sûre que rien ne pourra arrêter le succès actuel de ton formidable et prodigieux livre irrésistiblement bon, grand, dramatique, amusant, poignant, terrible, sublime et divin. Il est à la portée de toutes les intelligences, il intéresse l’humanité tout entière, il est l’esprit de Dieu même dans la raison, dans la justice, dans la pitié, dans l’amour. Oh ! que je regrette de ne savoir pas te traduire ce que j’éprouve, tu verrais alors ce qu’est ton livre pour tout le monde et en particulier pour moi dont tu es le [illis.] adoré ! Mais ma [plume ?] bégaie comme mon ignorance. Il n’y a que mon cœur et mon âme qui comprennent et qui te disent tout en un seul mot : JE T’AIME ! Pourvu que tu aies passé une bonne nuit et que tu n’aies pas mal à la tête.
BNF, Mss, NAF 16383, f. 124
Transcription de Camille Guicheteau assistée de Guy Rosa