[Vendredi 4 juillet 1834 ?] [1]
Juillet [18]34a
9 h. du soir, vendredi
En te quittant, je me suis empressée de me mettre à la fenêtre, espérant te voir encore quelques secondes et diminuer d’autant le temps que je devais passer loin de toi – Mais tu étais déjà parti. Méchant, tu ne m’avais seulement pas attendueb – Je suis donc restéec seule, depuis ce moment-là. Et comme il me serait impossible de rester plusieurs heures sans m’occuper de toi – j’ai entrepris de transvaser dans le vieux coffre le trop-plein de mon portefeuille. Cela m’a donné l’occasion de relire toutes tes lettres qui ne sont qu’au nombre de vingt et voilà dix-sept mois que nous nous aimons. J’ai relu tes lettres, j’ai touchéd tout ce qui me venait de toi, j’ai baisée tous mes souvenirs, même les plus tristes car pour être amers, ils n’en sont pas moins chers. Enfin, j’ai classéf dans un carton tous ces autographes que tu m’as donnésg car ils ne seront pas les moins intéressants de l’époque quand on les lira dans 10 ans. Enfin, et pour te dire toute ma journée, je t’ai aimé, je n’ai pensé qu’à toi – je ne désire que toi – Viens vite, tu verras si je t’aime.
Juliette
[Adresse]
[1re ?] [2]
Pr toi mon Victor
BnF, Mss, NAF 16322, f. 155-156
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
a) Date rajoutée sur le manuscrit d’une main différente de celle de Juliette. Cette datation se fonde sur l’indication « et voilà dix-sept mois que nous nous aimons ».
b) « attendu ».
c) « resté ».
d) « touchée ».
e) « baisée ».
f) « classée ».
g) « donné ».