Mercredi matin, 10 h. ¼
[Après le 3 juillet 1834 ?]
Hier à pareille heure, j’étais bien heureuse, mon Toto, et je n’avais pas besoin de t’écrire pour te dire combien je t’aime. Aujourd’hui, je t’aime autant, sinon plus, et je suis triste parce qu’au lieu de te posséder je te désire, au lieu de te baiser je t’écris. Ton absence, c’est un gros nuage de pluie sur mon soleil.
Je donnerais 10 ans de ma vie pour la journée d’avant-hier. Je donnerais toute ma vie pour un jour tout entier avec toi. Si le bonheur pouvait s’acheter avec la vie, il y a longtemps que la mienne serait dépensée. La vie ce n’est rien, le bonheur c’est tout ! Je voudrais te voir, mon Victor. Il me semble qu’il y a un mois que je ne t’ai vu, de même que les deux jours que nous avons passés ensemble [1] nous paraissaient n’en faire qu’un. Mon Toto bien aimé, je ne sais rien te dire que mon amour, rien désirer que ta personne. Je ne pense à rien, qu’à toi. Je ne peux rien dire autre chose que : je t’aime.
Juliette
Lanvin vient de venir pour cet exemplaire. Il paraît désirer beaucoup que tu t’y intéressesa. Il m’a dit avoir vu M. P. [2] il y a huit jours.
4 h. ½
Mon pauvre cher Toto, il faut que j’expie ces deux jours de bonheur passés avec toi, je le vois bien. Je tâche d’y mettre le plus de résignation que je peux. En attendant, je travaille et j’étudie, c’est-à-dire je pense à toi et je t’aime. Mme Pierceau m’a envoyé son petit garçon par quelqu’un que je n’ai pas vu, en me disant [fin]
[Adresse]
À mon adoré
BnF, Mss, NAF 16322, f. 127-128
Transcription de Jeanne Stranart et Véronique Cantos assistées de Florence Naugrette
[Souchon, Massin]
a) « intéresse ».