16 mars 1879

Paris, 16 mars [18]79, dimanche, 8 h. ¾

Cher bien-aimé, j’étais allée savoir des nouvelles de ta nuit que Mariette m’a dit avoir été assez agitée dans la première partie, mais comme tu avais repris un bon sommeil je n’ai pas voulu l’interrompre, me contentant de t’embrasser des yeux et du cœur de te sourire et de te bénir de toute mon âme. L’Officiel n’est pas encore venu mais tu as plusieurs lettres intéressantes, entre autres^a celle de Mounet-Sully qui te prie, qui te supplie de lui faire répéter en particulier le grand rôle, le beau rôle, le formidable rôle, l’écrasant rôle, l’admirable rôle, le sublime rôle de Ruy Blas ! qu’il est si fier de tenir de toi en même temps qu’il en est si effrayé et si ébloui. Tout cela est dit et senti sincèrement. Il s’accuse d’avoir été au-dessous de ta confiance et de lui-même dans Hernani à la première représentation et il voudrait prendre sa revanche avec Ruy Blas avec l’aide de tes précieux conseils si tu daignes les lui donner. Il y a encore une lettre de Berthelming (Lorraine) d’un M. A. Benoit qui t’offre, ou plutôt, qui tient à ta disposition une soixantaine de pièces et de dépêches signées par le général Hugo pendant le blocus de 1814 et 1815. Ci-joint copie de deux dépêches, celle du 12 novembre 1815 est la dernière. Toutes sont autographes, dit la lettre. Au reste tu verras tout de suite si cela a de l’importance pour toi car je joins la lettre et le document en question à mon gribouillis. Et puis il fait un temps exquis et puis je t’aime et puis je t’adore et voilà.

Collection particulière / MLM / 62260 0080/0082
Transcription de Gérard Pouchain
[Charpentreau]

a) « entr’autre ».