Paris, 10 mars [18]78, dimanche matin, 8 h.
Bonjour, mon cher adoré, ne te réveille pas il n’est pas encore l’heure. Quant à moi, je suis dans une phase d’insomnie mais j’attends patiemment qu’il plaise au sommeil de me visiter en t’aimant de toute mon âme. Petit déjeuner jaune [1] est déjà attablé en attendant qu’on le croque lui-même. Pendant ce temps-là, les lettres, les journaux et les livres s’amoncèlent sur ma table. Il y a parmi eux une lettre de convocation du Sénat que je te ferai porter dès qu’il fera jour chez toi. Je vais sortir du coffret, où je l’ai serré, le papier que tu désires rectifier. Cela me fait penser qu’il faut que j’écrive à Lecanu pour lui dire de ne pas venir mercredi à moins que Mme Lockroy ne m’assure qu’elle ne dînera pas avec nous ce jour-là. C’est ce que je lui demanderai tantôt. Il m’est impossible de me rappeler avec certitude quel jour j’ai invité Louis Leroy. Je crois bien que c’est pour vendredi mais je ne l’affirme pas. Peut-être ta mémoire sera-t-elle plus heureuse que la mienne. Il faudra que tu prennes un moment pour répondre à la demande de billets pour Hernani que te demande la fille de Morin, le maître d’école de tes petits enfants, Charles et Victor . D’autres lettres encore qui URGENT. Je ne veux pas finir mon gribouillis sur ce trait de scie mais sur le mot de la fin des fins : je t’adore.
BnF, Mss, NAF, 16399, f. 68
Transcription de Chantal Brière