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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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7 septembre [1847], mardi matin, 8 h.

Bonjour, mon Toto, bonjour toi, bonjour vous, bonjour tous ceux qui se portent bien et qui ont très faim. Bonjour, les goinfres, bonjour, les gueulards, bonjour, les ogres bonjour. Dorloteza-vous dans vos dodos tant que vous pourrez car il fait un froid de loup et c’est à peine si je peux tenir ma plume. Pour peu que cela continue, je suis capable de geler dans ma peau de Juju.
Saviez-vous, mon cher petit homme, que je n’ai pas beaucoup de plaisir. Vous venez très peu et vous me parlez encore moins, ce qui fait un bonheur médiocre. Encore si vous me donniez un petit dessinb de temps en temps, ce ne serait que justice et je verrais que vous pensez à moi. Mais rien du tout, ni chair, ni poisson, ni eau, ni boudin, c’est trop CHESSE et peu encourageant. Aussi je ne suis pas contente du tout, du tout, du tout. Taisez-vous vilain sâle, je bouche mes oreilles d’avance pour ne pas entendre vos hideuses raisons.
Heureusement que votre petit Toto va bien et qu’il a une faim dévorante, ce qui fait que je vous pardonne et que je ne suis pas aussi malheureuse que vous le mériteriez. Baisez-moi si vous l’osez et tâchez de vous mieux conduire à l’avenir si vous pouvez, car je suis à bout de bonheur et de tout ce qui y ressemble.

Juliette

MVH, α 8996
Transcription de Nicole Savy

a) « Dorlottez ».
b) « dessein ».


7 septembre [1847], mardi après-midi, 2 h. ¾

Toujours de mieux en mieux, mes chers petits, ce qui me ravit et me rend bien heureuse. D’ici à très peu de jours il n’y paraîtra plus de cette hideuse maladie, si ce n’est au vorace appétit de Toto, deuxième du nom, et à la méchanceté noire du Toto en chef.
Voyons un peu si ce TRAVAIL ensorcelé pourra se faire aujourd’hui, à peine ai-je pris une plume pour écrire mes IMPRESSIONS de jeunesse qu’il survient quelque distraction ou quelque empêchement pour m’empêcher de continuer [1]. Cependant j’ai bien un peu de bonne volonté, pas beaucoup à la fois, mais enfin j’en ai. Si vous en aviez seulement autant pour ma culotte je ne serais pas aussi tourmentée sur son avenir. Aha ben ouiche, pas souvent que je vous crois, un vieux menteur comme vous, il faudrait que je fusse mille fois trop naïve, je dirais même trop bête, pour y ajouter foi. Aussi je vous en donnerais des miroirs chinois, voime, voime, avec une pipe et des bas rouges. Maintenant vous savez le cas que je fais de vos protestations et les dispositions généreuses dans lesquelles je suis vis-à-vis vous. J’espère que vous n’en abuserez pas. Tâchez de venir bientôt, si vous tenez à ne pas me rendre la plus impatiente des Juju. Je vous dis que malgré tous vos torts, vous êtes toujours mon Toto adoré.

Juliette

MVH, α 8997
Transcription de Nicole Savy

a) « À ».

Notes

[1Juliette se met à la rédaction de ses souvenirs du couvent.

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