Guernesey, 16 janvier [18]68, jeudi matin, 8 h.
Cette fois-ci, mon grand bien-aimé, je n’ai pas perdu pour attendre puisque j’ai réussi à te voir au rendez-vous de la serviette. Ma joie a été de courte durée mais comme le bonheur ne se mesure pas à la quantité mais à la qualité, le mien ce matin ne laisse rien à désirer pourvu que tu aies passé une bonne nuit comme je l’espère. Moi aussi j’ai très bien dormi et je me sens très gaillllllardea aujourd’hui. Le temps lui-même a comme un titillement de printemps qui réveille le cœur et l’âme : les oiseaux chantent et les chats font l’amour à qui mieux mieux dans mon jardin. Il semble que l’hiver soit déjà passé. Encore un peu de patience et nous serons en plein beau temps, c’est-à-dire en pleine possession de tous nos doux plaisirs de promenade à pied, en voiture, d’intimité et de côte à côte. Je voudrais déjà y être et je t’aime, je t’aime, je t’aime.
BnF, Mss, NAF 16389, f. 16
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
a) « galllllliarde ».