16 septembre 1856

Guernesey, 16 septembre 1856, mardi après-midi, 3 h.

Restitus vit encore, mon cher petit bien-aimé, à preuve que la voilà qui bat de l’aile en pensant à toi. Et quoique Suzanne m’attende à la maison nouvelle, je ne m’en irai pas sans lui avoir donné satisfaction, à cette pauvre petite restitus de mon cœur. Dans le cas où tu viendrais avant que je n’aie fini mon branle-bas LÀ-BAS, tu serais bien gentil de venir me retrouver là-bas. En attendant, je m’épêche de finir ICI mes triquemaques et mes nettoyages^a, ce qui n’est pas très amusant. Puis j’ai reçu une lettre de Pianciani et une autre de ma filleule Julie, laquelle est dans le deuil de sa montre qu’elle a perdue ou qu’elle s’est laissé voler. Si je n’étais pas si désillusionnée sur l’espèce d’affection qu’elle a pour moi, je lui aurais donné la mienne précisément parce qu’elle m’est très nécessaire. Mais sa façon d’être avec moi depuis quelque temps m’a beaucoup refroidie et je sens que ma générosité serait une duperie plutôt qu’un bienfait bien placé. Aussi, je garde mon OCLOQUE pour une meilleure occasion. En attendant, je vous aime plus que plein mon cœur et de toutes les forces de mon âme. Tâchez, de votre côté, d’en faire seulement le quart et je m’en contenterai. Prenez votre bain et venez me retrouver le plus tôt possible pour que j’aie le temps de vous baiser depuis A jusqu’à Z. Avez-vous pensé au piche-niche pour demain ? Songez-y donc car le temps s’écoule, les jours courts et les brouillards arrivent au galop.

J.

Bnf, Mss, NAF 16377, f. 231
Transcription de Mélanie Leclère, assistée de Florence Naugrette

a) « nétoyages ».