[18]33a
Dimanche, 10 h. du soir
J’ai été bien méchante – bien folle – pardonne-moib – Si tu savais combien je souffre quand je crois m’apercevoir que tu es froid envers moi – Va, je souffre mille fois plus que ma pauvre âme n’en peut supporter – Mon amour – ma fierté sont bien souvent meurtris – à cause de notre position – et si tu négliges les rares occasions de me rendre les hommages et les soins que mon cœur a droit d’attendre de toi – tu comprends toute l’amertume de mon chagrin – Mon Dieu – tousc ces emportements qui se reproduisent si souvent – tueront ton amour, je le crains – Cette crainte me livre au découragement. Je voudrais mourir – ou m’en aller bien loin – Tout est préférable au malheur de perdre ton amour – Je ne sais pas si tu me comprends – mais je t’aime – je t’aime – Je donnerais mon sang – je donnerais ma vie – pour ne pas t’affliger une seule fois – et cependant, j’ai été injuste tantôt – Oh ! c’est que je t’aime trop, vois-tu – Je voudrais baiser tes mains, tes pieds – et mourir pour ton seul plaisir –
Je t’aime.
Juliette
Je suis bien souffrante et bien fatiguée – Je te conteraid demain les nouvelles misérables vexationse de ces ignobles gens du théâtre [1].
[Adresse]
Pr toi
BnF, Mss, NAF 16322, f. 26-27
Transcription de Jeanne Stranart et Véronique Cantos assistées de Florence Naugrette
[Souchon]
a) Date rajoutée sur le manuscrit d’une main différente de celle de Juliette Drouet. le mention « Icart » (propriétaire des lettres acquises par la BnF en 1969) figure au verso de la lettre.
b) « pardonnes moi ».
c) « tout ».
d) « compterai ».
e) « vexasions ».