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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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18 octobre [1838], jeudi matin, 10 h. ¼

Bonjour mon cher petit bien-aimé, bonjour mon adoré, comment vas-tu ce matin ?
Pauvre âme de mon âme, tu as encore passé la nuit et tes chers beaux yeux doivent être dans un bel état ? Je suis triste jusqu’à l’abattement quand je pense que c’est toute l’année et toujours. Oh ! je t’aime mon Victor.
Mme Guérard a envoyé chez moi. J’étais encore au lit, sa femme de chambre m’apporte une lettre dans laquelle elle me prie d’accepter une bague bleue. Je ne sais pas si c’est dans un accès de somnambulisme qu’elle m’a fait ce cadeau ou si la femme de chambre l’a perdue mais je n’ai pas vu la plus petite bague de quelque couleur que ce soit. Au reste, ceci est menaçant et nous présage une demande de places pour l’ouverture. Je ne te le conseille pas à cause du mari qui est fou et qui pourrait faire quelque esclandre ce soir-là. J’ai envie aussi d’écrire à Jourdain de venir prendre la mesure de la chambre. Ce sera un prétexte pour lui demander la vérification et nous aurons en même temps la mesure pour quand nous pourrons acheter un tapis. Il fait bien beau ce matin. Je t’adore, tu sais, je ne pense à rien, je ne dis rien que je ne mêle le mot je t’aime parce que c’est la seule chose que je sente, que je comprenne, et le seul but de ma vie. T’aimer, t’aimer et t’aimer. Quand te verrai-je mon amour ? As-tu répétition aujourd’hui ? Peux-tu me mener chez Gérard [1] ? J’aime mieux te baiser.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16336, f. 59-60
Transcription d’Élise Capéran assistée de Florence Naugrette


18 octobre [1838], jeudi soir, 4 h. ½

Vous vous êtes bien tôt débarrassé de moi mon Toto. Je sais bien que vous avez beaucoup de choses à faire et que ça ira toujours croissant jusqu’à vitam æternam. Du reste j’ai très mal à la tête, je m’ennuie à l’avenant, etc, etc. Pour me distraire je vais broyer des pavots toute la soirée. Si ça ne m’amuse pas ça m’endormira peut-être, ce qui vaut encore mieux. Il fait un froid de loup, j’attends que la nuit soit tombée tout à fait pour allumer mon feu. Et ma robe, quand l’essaierai-je ? ... Si Vieillesse pouvait et si Jeunesse savait il y aurait bien des choses sur lesquelles on reviendrait, soit dit en passant, et sans en parler davantage.
J’ai très mal à la tête et à la gorge, et encore plus à l’âme, mais à quoi bon se plaindre ? Parlons d’autre chose : il me semble que depuis trois ou quatre jours tu ne m’apportes pas les lettres de ta maison. Peut-être est-ce parce que tu crains de ne les avoir pas sous la main au moment de la répartition des billets ? Mais tu sais que j’ai grand soin de les mettre de côté, ainsi tu peux me les apporter comme auparavant, à moins que tu n’aies d’autre raison. Dans tous les cas tu peux me le dire, je m’y conformerai sans aucun doute.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16336, f. 61-62
Transcription d’Élise Capéran assistée de Florence Naugrette

Notes

[1À élucider.

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