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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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26 janvier [1839], samedi, midi ½

Je prends acte de ce que vous n’êtes pas venu ce matin, mon Toto adoré, ainsi que c’était votre devoir pour m’inscrire en faux contre notre ORGIE d’hier. Elle n’a point été échevelée puisqu’il n’y a pas eu de queue et tout le monde sait qu’une orgie sans queue, une fête sans lendemain, ne compte pas. Ainsi c’est à recommencer et le plus tôta possible. Ça vous apprendra à venir me chercher si tard, à me mener au vaudeville Saint-Antoine et à ne pas REVENIR DÉJEUNER avec moi quand vous me l’aviez si bien promis. J’espère, mon cher petit homme, que tu n’as pas été malade de notre petit prologue d’hier ? J’aurais désiré plus que jamais t’avoir à déjeuner ce matin : je t’aurais dorlotéb, aimé, dandiné et adoré. Pourquoi donc, vilain méchant, que vous m’avez emporté Le Corsaire [1] ? Je ne l’avais pas lu et je voulais garder le rébus [2] de Ruy Blas. Vous êtes joliment bête. Venez me baiser et rendez-moi mon journal tout de suite. Il faut tâcher de me mener chez la mère Pierceau ce soir à cause d’une servante. Je t’assure que je ne saurai pas comment faire ni à qui m’adresser si je n’ai pas celle qu’on lui a promise. Tâche de m’y mener ce soir. Je t’aime, mon Toto.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16337, f. 97-98
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

a) « plutôt ».
b) « dorlotté ».


26 janvier [1839], samedi soir, 7 h. ¼

Après la conversation de tout à l’heure, je ne vois pas trop, mon cher adoré, ce qui me resterait à dire sans le petit post-scriptum de l’escalier et quoiqu’il soit triste de penser que nos derniers moments valent en général mieux que nos premiers, je m’accroche de toute la force de mon amour après ce petit serrement [illis.] fait entre deux portes. D’ailleurs depuis longtemps, je me contente de peu et pourvu que tu m’aimes, je fais bon marché du bonheur. Tu m’as apporté un bien joli petit pot, malheureusement il n’est que cela car il est vide de joie et d’espérance, comme mon pauvre cœur. Enfin ce n’en est pas moins un joli pot et vous un charmant petit homme. J’ai mal à la tête, le sang s’y est porté tout à coup et il n’en faut pas tant pour rappeler au grand galop le mal de tête qui n’est jamais bien loin chez moi. Je ferai en sorte d’avoir plus d’exactitude et plus de mémoire à l’avenir car je ne suis pas comme vous, moi, dédaigneuse des moyens qui peuvent vous tranquillisera et vous plaire. En attendant, je remets dans ma panoplie mes armes DISCOURTOISES et prends le rameau d’olivier que je mets à vos pieds en signe de soumission et de réconciliation et de paix.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16337, f. 99-100
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

a) « tranquiliser ».

Notes

[1Le Corsaire : quotidien spécialisé dans les spectacles, la littérature et les arts.

[2À élucider.

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