Guernesey, 7 mai 1857, jeudi après-midi, 3 h. ½
Cher adoré, les soins à donner à ma nouvelle petite famille ne m’empêchent pas de trouver le temps bien long entre chacune de tes courtes apparitions, au contraire, car plus la vie se multiplie autour de moi et plus mon cœur s’emplit d’amour pour toi et plus j’ai besoin d’épancher le trop plein de mon cœur dans le tien.
Tu sais sans doute l’indisposition de Mlle Allix ? Suzanne a rencontré la bonne qui cherchait la maison du docteur Terrier sans pouvoir la trouver ; ce que voyant, Suzanne l’a conduite jusque chez Préveraud [1]. Malheureusement le docteur est à Jersey depuis hier et il n’est pas sûr qu’il revienne demain. J’espère que le malaise de Mlle Allix ne s’aggraveraa pas d’ici là ; en attendant je crois que je ferai bien de lui faire une visite ce soir, qu’en dis-tu ? J’ai reçu une lettre de la mère Lanvin toute remplie de reconnaissance pour toi car il paraît que, sur le souvenir de ton ancienne recommandation et dans la pensée que le procédé te touchera, ton cousin Trébuchet vient de faire avoir une place de onze cents francs (avec espoir d’augmentation) dans la salubrité de Neuilly à ce pauvre Lanvin. Moi je n’ai qu’une crainte, c’est que cette bonne action ne te contrarie et je voudrais déjà savoir ce que tu en penses. D’ici là je suis assez tourmentée car rien ne m’est plus pénible que de te savoir ennuyéb à cause de moi.
J.
BnF, Mss, NAF 16378, f. 77
Transcription de Chantal Brière
a) « s’agraver ».
b) « ennuié ».