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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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12 juillet [1838], jeudi matin, 10 h. ½

Bonjour mon petit bien-aimé, bonjour mon amour. La journée se prépare chaude et triste car le soleil darde déjà ses rayons sur mes persiennes et toi, tu t’en vas le plus loin possible de moi. Je serai bien heureuse le jour où tu m’emmèneras bien loin. Mon bonheur sera proportionné à la distance que nous mettrons entre nous et Paris, ou plutôt mon bonheur sera dans toute son intensité chaque fois que je pourrai tenir ta chère petite main dans la mienne et mes yeux sur les tiens. Ma Claire est arrivée tout à l’heure. Son œil va bien tout à fait. Il paraît qu’elle dormait comme un sabot quand j’y suis allée. Ainsi je me suis trompée en croyant entendre sa voix. C’est un petit malheur. Ce qui est un bonheur, mon Toto, c’est que je vous aime de toute mon âme. Si vous m’aimiez seulement la moitié autant que moi je serais tranquille et heureuse. Jour, mon petit o. Jour mon gros To. Donnez-moi votre petite bouche.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16335, f. 45-46
Transcription de Sandra Glatigny assistée de Gérard Pouchain


12 juillet [1838], jeudi soir, 5 h. ¾

Mon petit homme, mon petit homme, je vous aime. Vous devriez m’écrire une bonne petite lettre pour la peine que je vous ai donné mon joli petit encrier. Mais vous ne le ferez pas, il n’y a pas de danger, vous êtes bien trop AVARE pour cela. Ouf, j’étouffe dans mes pantouflesa. J’ai cependant ôté ma chemise de flanelle et mis une chemise à jour mais je n’en ai que plus chaud. Oh ! là là ! papa, papa, vous avez tourné le mauvais coin tantôt. Est-ce que vous voulez faire connaissance avec la pointe de mon couteau ? Je n’aime pas quand vous traînez vos guêtres derrière ma maison. J’ai trop l’air d’une bête à CORNE et j’ai la prétention de n’être qu’un petit toucan bien gentilb. Regardez et frémissez dans votre peau de poète. Je vous attends de pied ferme en aiguisant mon bec le plus que je peux. Tâchez de nous faire sortir ce soir comme plusieurs loups. Pensez que j’ai Claire et que je suis toujours enfermée. Aimez-moi. Je vous adore.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16335, f. 47-48
Transcription de Sandra Glatigny assistée de Gérard Pouchain

a) « pantouffles ».
b) Dessin d’un toucan :

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