Paris, 24 décembre [18]73, mercredi, 1 h. du soir
Cher bien-aimé, j’ose à peine effleurer ton cœur de mon amour tant j’ai peur de le blesser en voulant le calmer. Et puis je suis si tourmentée et si triste moi-même du revirement brusque de ton pauvre bien-aimé fils [1], que je croyais si près de la santé, que je ne trouve rien à te dire sinon que je t’aime et que je crois en Dieu, que je te supplie de t’épargner cette nouvelle douleur imméritée, comme toutes celles qui t’ont déjà frappé, et que j’associe toutes nos chères âmes à cette prière comme étant plus près de Dieu que moi pour l’obtenir.
5 h.
Je t’ai laissé partir seul à ta promenade, mon cher bien-aimé, parce que je sens l’inopportunité de ma présence auprès de toi dans les situations d’esprit et de cœur où tu [te] trouvesa ce soir ; mais mon âme t’accompagne et s’unifie à la tienne pour espérer, pour aimer et pour bénir le cher être qui t’inquiète en ce moment. Souviens-toi qu’Allix a dit hier qu’il a été beaucoup plus mal il y a dix mois. Il suffit que la fièvre tombe pour que tout danger disparaisse et il faut espérer qu’elle disparaîtra puisque les symptômes si alarmants de diarrhéeb et de toux sont déjà presque tous dissipés. Espérons mon adoré bien-aimé et confions-nous à Dieu.
BnF, Mss, NAF 16394, f. 356
Transcription de Manon Da Costa assistée de Florence Naugrette
a) « trouve ».
b) « diarhée ».