Paris, 27 avril [18]77, vendredi matin, 8 h.
Bonjour, mon grand petit homme. Bonjour, je t’adore. Le temps est à souhait aujourd’hui pour être heureux : sois-le ! Je me sers de cet impératif de Petite Jeanne avec l’espoir sournois de prendre ma part de ton bonheur, ce qui diminue de beaucoup la générosité de mon souhait. Je te l’offre tel qu’il est, dussé-je n’en pas profiter du tout. Êtes-vous content, môsieu ? Si vous ne l’étiez pas, je vous offre en compensation le plaisir d’écrire à M. Bolivar et autres intéressants étrangers. Il faut aussi, et surtout, que tu répondes tout de suite à Mme Chenay si tu veux que l’avis que tu crois utile de lui donner lui arrive à temps et avant M. Lefèvre. Autre guitare, c’est le chèque de deux mille francs que t’envoie Hetzel comme acompte sur ce qu’il te doit. Ce serait le cas, il me semble, d’en faire tout de suite un bon usage par l’achat des choses indispensables pour la maison et pour moi. Mais je n’ose pas l’espérer.
La pauvre Mme Lesclide ne va pas mieux et les médecins continuent d’être inquiets, dit la petite servante. J’espère qu’elle n’est pas bien informée et que nous aurons de meilleures nouvelles tantôt.
Je finis mon gribouillis comme je l’ai commencé en t’aimant de toute mon âme.
BnF, Mss, NAF 16398, f. 115
Transcription de Guy Rosa