1er septembre [1848], vendredi soir, 9 h. ½
Je ne suis pas encore au bout de mes peines et de mes travaux, mon cher petit bien-aimé, car je tiens à honneur de faire un chef-d’œuvre de mon burgos [1]. Les doigts avec lesquels je tiens ma plume sont tout meurtris à force d’avoir frotté et d’avoir enduit de la cire à modeler dans les incrustations….. absentes et dans les trous de vers. Demain matin, je tâcherai d’achever le reste si j’en ai le temps et si je ne suis pas trop fatiguée pour me lever de bonne heure. Pour être plus vite à la besogne, j’ai pris un omnibus pour revenir tantôt. Ceci, joint à toutes les autres dépenses non prévues par la république, m’obligera certainement à vendre ma dernière chemise ce mois-ci pour manger. À moins que je ne découvre quelquesa truffes nourrissantes dans le trajet du Marais à l’Assemblée, dite nationale. Cron, cron, cron, cron, peut-être qu’en cherchant bien cela n’est pas impossible. Demain je me mets à la recherche et je commence par vos poches, cron, cron, cron. En attendant, je ne vous pardonne pas votre épopée d’avant-hier et je compte bien en tirer vengeance très prochainement. Méfie-toi, Toto, je ne te dis que cela. Ça surtout, baise-moi si tu tiens à la vie.
Juliette
Leeds, BC MS 19c, Drouet/1848/60
Transcription de Joëlle Roubine
a) « quelque ».