3 avril 1860

Guernesey, 3 avril 1860, mardi matin, 7 h. ½

Bonjour mon cher petit homme, bonjour à tous^a crins et à tout cœur ; bonjour, avec le diable et son train ; bonjour, comment que ça vous va ce matin, mon colonel ? Notre pauvre gambe ne se sent-elle pas fatiguée de notre longue promenade d’hier ? Avez-vous bien dormi ? J’espère que oui, ce qui me consolera de ma bête de nuit blanche. En général plus je prends de précaution pour bien dormir et moins je dors. Aussi je n’en veux plus prendre aucune, ce qui forcera le bonhomme sommeil à venir me trouver quand cela lui plaira. Et pas le moindre rack, craick, [brack  ?], sacrrré. Et penser que ce pékin de parisien vient me les prendre à mon [illis.], graick, [plusieurs mots illisibles] c’est à en grincer des dents. Et à en et à en cracher son guernesiais de rage. En attendant que l’heure des représailles sonne à mon BEFFROI de terre de pipe Louis XVI [1] je vous envoie sommation de m’aimer et contrainte par corps de me payer tout ce que vous me devez, y compris les 48 sous d’ancien. Sur ce et parlant à votre personne, baisez-moi.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16381, f. 70
Transcription de Claire Villanueva

a) « à tout crins »