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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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15 juin 1860

Jersey, 15 juin 1860, vendredi matin, 7 h. ½

Bonjour, mon cher bien-aimé, bonjour avec tous les enthousiasmes, avec tous les délires d’hier au soir ajoutés aux miens propres. Combien j’ai regretté que ta chère et digne femme et ta noble et courageuse fille n’aient pas pu assister à ce meeting. Quel bonheur pour elles et quelle gloire d’assister à ce radieux et suprême triomphe. Je t’assure que je crois que je leur aurais sacrifié la moitié de mon propre bonheur hier pour leur procurer le plaisir de voir et d’entendre ces hurrahs, ces bravos, ces cris d’amour, d’admiration et de vénération de cette foule attendrie, respectueuse et enivrée. Je sais bien que l’écho leur en arrivera au cœur mais ce n’est pas la même chose. Pourvu, mon cher adoré, que tu ne sois pas trop fatigué et que tu aies passé une bonne nuit ? J’aurais voulu rester chez Asplet [1] pour te servir, pour te soigner, pour t’adorer au lieu de rentrer bêtement à mon auberge. Quel stupide préjugé que celui qui sépare deux êtres qui n’ont qu’une âme en deux parties et qu’une seule vie pour deux. Enfin, il faut bien se résigner, trop heureuse si l’émotion et la fatigue de cette mémorable soirée d’hier ne t’ont pas empêché de dormir. Je suis bien contente que tu aies pu réconcilier les frères Asplet [2] et d’avoir pour ma part servi de trait d’union entre la charmante Mme Ch. Asplet et son beau-frère Philippe. J’espère que cette soudure sera solide quoique Philippe m’ait paru froid et contraint hier. Peut-être est-ce l’émotion ? L’avenir nous le dira. En attendant tu as fait tout ce que tu as pu pour raccommoder ces deux bons frères ennemis. Cher adoré, je suis encore toute étourdie des bravos d’hier et tout mon être vibre encore d’admiration et d’adoration. Je ne puis [illis.] dire autre chose sinon que je suis abîmée dans une extase suprême depuis hier.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16381, f. 151-152
Transcription d’Amandine Chambard assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Victor Hugo loge chez Charles Asplet.

[2Philippe et Charles Asplet, brouillés, sont réconciliés par Hugo.

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