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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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30 novembre [1835], lundi matin, 10 h. ½

La surprise, l’effroi du premier moment m’ont empêchéea de m’assurer si tu ne t’étais pas blessé en luttant avec ces ignobles banditsb, ou si tu n’avais pas reçu de mauvais coups d’eux.
Depuis que tu m’as quittéec, mon cher petit homme adoré, je suis dans une inquiétude atroce. J’ai passé la nuit à désirer le jour, espérant que tu viendrais de bonne heure me rassurer sur l’événement de cette nuit. Figure-toi que lorsque tu m’as eu quittéec, je suis restéed à genoux sur mon lit plus d’un quart d’heure la pensée, l’oreille et le cœur tournés sur le chemin que tu devais parcourir pour rentrer chez toi, craignant toujours qu’il ne t’arrivâte quelque malheur.
Enfin depuis ce moment-là, j’ai une douleur de cœur que je conserverai probablement jusqu’à ce que je t’aie revu, et que je me sois assuréef que tu n’as pas de mal sur ta chère petite personne que j’aime et que j’adore de tout mon amour.
Mon cher bien-aimé, si tu es bien bon, et si tu m’aimes un peu de l’amour que j’ai pour toi, tu comprendras mes inquiétudes, tu éprouveras le besoin que j’éprouve de te voir, et tu viendras le plus tôt possible. Et je serai bien reconnaissante et bien heureuse si tu ne souffres pas. Et je baiserai tes pieds, tes mains, tes yeux, ta bouche pour te remercier de m’avoir exaucéeg.

J.

BnF, Mss, NAF 16325, f. 166-167.
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « empêché ».
b) « bandis ».
c) « quitté ».
d) « resté ».
e) « arriva ».
f) « assuré ».
g) « exaucé ».


30 novembre [1835], lundi soir, 8 h. 20 m.

Vous êtes bien gentil d’être revenu si vite, et je vous pardonne, et je vous engage à être jaloux et défiant quand cela tourne si bien à mon profit.
Je vous aime, mon cher petit Toto, je voudrais vous avoir toujours là pour vous le dire et vous le prouver. Si vous revenez de bonne heure ce soir, je sais bien ce que nous ferons de bon et de ravissant…aNous ferons l’amour.
En attendant, je vous écris, je vous aime et je vous désire. Et puis je vais faire mes comptes de fin de mois en termesb de commerce et de ménage.
Je pense à la lettre de ce ou de cette olibriusc qui se nommed Laporte [1]. En vérité, il faut être bien obtus ou bien obtuse pour écrire une pareille lettre à quelqu’un qu’on ne connaît pas et qu’on n’a jamais vu. Au reste, je m’en moque de sa lettre comme de toutes celles qu’on pourrait m’écrire dans le même style et avec la même orthographe. Je t’aime. Je ne m’occupe plus de toutes ces misères-là. Je t’aime. Avec cela, je suis forte et je ne crains aucun de mes créanciers, fût-il aussi fort et aussi élastique qu’un [illis.] de la porte Harel [2].
Oui, je t’aime, mon Victor. Oui, tu es ma joie, mon espoir, mon refuge, mon tout. Je t’aime toujours plus.
À bientôt ; surtout ne te laisse pas attaquer de nouveau pas ces affreuses araignées de cette nuit. Pense que je t’aime et que je t’attends.

J.

BnF, Mss, NAF 16325, f. 168-169
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) Des points courent jusqu’au bout de la ligne.
b) « en terme ».
c) « holibrius ».
d) « qui ce nom  ».

Notes

[1À identifier.

[2Le Théâtre de la Porte-Saint-Martin est dirigé par François Harel.

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