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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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23 novembre [1835], lundi matin, 11 h.

Bonjour, mon cher petit homme fugitif. À peine ai-je eu le temps de vous apercevoira, mon cher petit homme rayonnant, que vous étiez disparub comme un rêve de bonheur. Il ne me reste de votre apparition que quelque chose d’insaisissable comme le bonheur. Si ce n’était l’énorme paquetc que vous avez déposé sur mes pieds, je croirais à une vision, à un éblouissement.
Mon Victor, que je t’aime, que je voudrais être bien portante et vivre quelques heures avec toi et de toi.
J’ai un appétit furieux de ton amour et de ta personne. Je te conseille de te tenir en garde devant mon grand amour, ma grande bouche, et mes grandes dents. Car ces énormes dimensions ne sont que pour mieux t’aimer, mieux te baiser, et mieux te manger, mon cher petit chaperon noir. À tantôt, votre ogresse

Juju

BnF, Mss, NAF 16325, f. 144-145
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
[Massin]

a) « appercevoir ».


23 novembre [1835], lundi soir, 8 h.

Je t’aime, mon Victor chéri. Je ne me lasse pas de te le dire, pas plus que je ne me lasse de le sentir. Mon amour, c’est ma poésie à moia. Je suis toujours en contemplation devant lui. Sous quelque aspect que je le regarde, je le trouve ravissant et merveilleux. Je ne voisb rien qu’à travers lui. Je ne sens que lui, je ne comprends que lui.
Si je désire être quelque chose par moi-même, c’est pour alléger ton fardeau de travail et de peine et pour que tu aies plus de temps à donner à notre amour. Si je désire le plaisir de voyager, c’est parce qu’il nous sert de prétexte pour nous rapprocher pendant tout le temps qu’il dure. Et ainsi de tout ce que je veux, de tout ce que je pense, tout cela se rapporte à notre amour, à notre bonheur.
Depuis près de deux mois que nous sommes revenus de la campagne [1], je n’ai pas encore passé une journée ni une soirée entière avec toi. Aussi suis-je bien triste et me paraît-il souvent que tu m’aimes moins qu’autrefois. Cependant, tu étais si tendre ce soir, si doux, si affectueux qu’il me semble que je me suis trompée et je t’en demande pardon à genoux.
Va, j’aime bien mieux n’avoir pas le bon droit de mon côté dans ce cas-là et je ne tiens pas à m’humilier pour te demander pardon de trop t’aimer.

J.

BnF, Mss, NAF 16325, f. 146-147.
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « ma  ? moi ».
b) « je ne voie ».

Notes

[1Tandis que Victor Hugo était avec sa famille en villégiature chez les Bertin, Juliette Drouet séjourna à proximité, aux Metz, du mercredi 9 septembre au mardi 13 octobre 1835, date de son retour à Paris.

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