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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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27 janvier [1836], mercredi matin, 9 h. ¼

Bonjour, mon cher petit homme, m’aimez-vous ce matin ? Moi, je ne sais pas si je vous aime, mais je n’ai pas une pensée qui ne soit à vous, pas une pulsation, pas un souffle qui ne soit pour vous.
As-tu bien dormi mon cher petit bijou ? Ne t’es-tu pas couché trop tard ? Moi, j’ai très bien dormi et n’était l’affreux événement que tu m’as raconté, j’aurais très bien dormi. Pauvre ami, c’est bien malheureux et bien triste ce qui est arrivé à ce pauvre Mr Durand . Aussi depuis que tu m’as dit cela, je ne peux pas m’empêcher d’avoir peine pour toi de tous les malheurs qui arrivent dans le monde. Mon Dieu, je t’en supplie, mon cher bien-aimé, prends bien garde à toi. Car si jamais un accident de ce genre t’arrivait, j’en mourrais sur la place ou j’en deviendrais folle. Mon cher petit Toto, mon cher petit bien-aimé, fais bien attention à toi.
Vous avez laissé votre grosse canne ici ; quoique j’aie bien du bonheur à voir votre représentante, j’aimerais mieux que vous l’ayez emportée parce qu’elle peut vous défendre et vous protéger au besoin comme elle l’a déjà fait. J’attends ce matin cet ignoble D. [ou B. pour Barther ?] Cela m’ennuie, mais enfin il faut bien subir encore cet ennui pour la dernière fois.
Mon Dieu que je t’aime. Mon Dieu que je vous aime. Je suis toute en vous mon Toto, je vous adore, venez vite me voir, vous ne serez pas fâché, je vous assure. Pensez à moi un peu, mon chéri. Je ne pense qu’à vous.

J.

BnF, Mss, NAF 16326, f. 39-40
Transcription d’André Maget assisté de Guy Rosa


27 janvier [1836], mercredi, 7 h. ¾

Mon cher petit malade, je t’aime. Mon pauvre ange souffrant, je t’adore. Écoutez, mon cher petit homme bien-aimé, il faut absolument que vous vous reposiez au moins quelques nuits. Si ce n’est pas pour vous, faites-le pour moi qui suis malade aussi et qui ai besoin de tranquillité et de repos. Et comment voulez-vous, mon cher adoré, que je sois tranquille quand vous êtes souffrant, comment voulez-vous que je dorme quand je sais que vous vous tuez pour moi. Cela n’est pas possible. Il faut donc, mon cher petit adoré, que tu me fasses cette concession, rien que le temps de te remettre un peu tes petits boyaux. Pendant ce temps-là nous mettrons une grande économie dans notre dépense et puis nous avons 50 francs dont nous pouvons disposer en toute sécurité de conscience, Claire étant chez moi. Ainsi, mon cher petit Toto chéri, tu n’as pas à te tourmenter pour ma maison. Je te prie de te tourmenter pour ma santé qui a besoin de la tienne pour être bonne. Je te prie d’avoir de la sollicitude pour mon bonheur qui consiste dans la possession de la chère petite personne en bon état.
Pauvre petit enfant, je sais bien ce que tu souffres car ce que tu éprouves, je l’éprouve. C’est une attention du bon Dieu de m’envoyer en même temps que toi les mêmes maux. Je veux qu’il en soit toujours ainsi. Je veux souffrir quand vous souffrirez. Ainsi, arrangez-vous pour vous bien porter tout de suite.
Mon cher adoré, je t’aime, mon Victor, mon grand Victor, je suis à tes pieds, à tes genoux, je les baise de toutes mes forces.

BnF, Mss, NAF 16326, f. 41-42
Transcription d’André Maget assisté de Guy Rosa
[Souchon]

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