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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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16 juin 1852

Bruxelles, 16 juin 1852, mercredi matin, 8 h.

Bonjour, mon petit bien-aimé, bonjour je t’aime et vous ? Question indiscrète mais à cette distance elle ne peut pas vous embarrasser, c’est pour cela que je vous la fais sans scrupule. D’ailleurs je réponds pour vous, c’est encore le meilleur parti : oui je t’aime ma Juju. Oui, je n’aime que toi, oui, je te suis bien fidèle de corps, de pensée et de cœur. Ne t’inquiète pas de quelques apparences suspectes dans lesquellesa ma conscience ni ma volonté ne sont pour rien. Fie toi à moi, ma pauvre bien-aimée, et je ferai de ta vie un bonheur à faire envie aux anges.
Ai-je bien interprété ta pensée et ton cœur, mon adoré bien-aimé et consens-tu à mettre approuvé l’écriture ci-dessus pour copie conforme avec ta signature légale au bas ? C’est ce que tu me diras tantôt. D’ici là je me fais l’illusion bien douce de croire que tu m’appartiens tout entier et je vis heureuse en t’attendant. Cela n’empêche pas que je n’aie, chemin faisant, des ennuis de DOMESTIQUE. Toujours ceux que tu connais. Je t’assure mon cher petit homme qu’il nous sera bien difficile de garder cette fille dont le service devient de plus en plus négatif et l’humeur impossible. Quant à moi, si j’étais livrée à moi-même, il y a déjà longtemps que je l’aurais renvoyée. Mais au moment de partir à l’étranger je crois qu’il faudrait très sérieusement prendre un parti à son sujet. D’ailleurs, en la mettant en demeure de s’en aller ou de rester à condition de meilleur service et de manières plus honnêtes, on aurait tout à gagner soit qu’elle s’en aille soit qu’elle reste. Réfléchis-y, mon Victor, ne recule pas devant l’ennui de t’occuper de cette position qui devient de jour ne jour moins tolérable par les exigences de cette fille qui se croit indispensable et qui finira par me devenir odieuse. Et puis je me rendrai à ton avis quel qu’il soit car avant tout c’est toi que je veux contenter.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16371, f. 137-138
Transcription de Bénédicte Duthion assistée de Florence Naugrette

a) « lesquels ».


Bruxelles, 16 juin 1852, mercredi après-midi, 1 h.

J’ai fait un heureux tout à l’heure et je ne dirai pas et n’ai pas voulu l’être, comme certain personnage de l’Antiquité car Dieu sait que je ne demande que plaie et bosse pour M. Bonaparte et joie et bonheur pour nous. Tout cela veut dire que j’ai descendu ton précieux autographe à M. [Hausman  ?], lequel en a paru comblé. Du reste je ne doutais pas de l’effet. Maintenant nous pouvons user de ses plumes et de son talent sur la taille, tout le temps que nous serons en Belgique, y restassions-nous jusqu’à la fin du monde [1].
J’ai chez moi des gilets de flanelle de chez ton chemisier. Tu les essaieras, ilsa ne sont pas très fins mais ils n’en seront que plus forts et puis, ils ne sont pas très chers, 8 [illis.] chaque. La flanelle a été bouillie pour l’empêcher de rétrécir au blanchissage. Voilà, mon petit homme. Maintenant encore, je voudrais bien savoir quand vous viendrez pour vous voir un peu plus longtemps ce soir. Je me décide à aller au cours Rastoul Vous voyez que je suis capable de tout. En attendant je vis derrière mon rideau avec votre pensée, ma douce et fidèle compagne. Mais pour que cette pensée devienne joie et bonheur il faut que votre présence s’y ajoute de temps en temps. Sans cela, mon adoré bien-aimé, je suis triste et découragée et je n’ai plus de cœur à rien. Mais je ne veux pas t’attrister toi-même mon pauvre sublime piocheur. Je veux au contraire te sourire avec le souvenir de mon bonheur passé et les espérances de mon bonheur à venir. Je te baise d’emblée et sans le [illis.].

Juliette

BnF, Mss, NAF 16371, f. 139-140
Transcription de Bénédicte Duthion assistée de Florence Naugrette

a) « il ».

Notes

[1Dès le mois d’avril 1852 Victor Hugo envisage de quitter la Belgique pour l’île anglo-normande de Jersey.

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